#Médicaments #Bon usage

Hypertension artérielle : le Conseil d’Etat suspend le déremboursement de l’olmesartan

Devant les résultats de nouvelles études sur l’efficacité et la tolérance de l’olmesartan, le SMR (service médical rendu) des spécialités contenant de l’olmesartan (ALTEIS, ALTEISDUO, OLMETEC, CoOLMETEC, AXELER et SEVIKAR) est passé d’"important" à "insuffisant" le 29 avril 2015.
 
Suite à cet abaissement du SMR, le déremboursement des médicaments contenant cette substance a été annoncé mi-2015 puis fixé par arrêté (en avril 2016) pour le 3 juillet 2016, laissant un temps d’adaptation pour permettre aux médecins de réévaluer le traitement des patients sous olmesartan.
 
Les laboratoires Menarini et Daiichi Sankyo ont déposé une demande de suspension de ce déremboursement et d'arrêt des injonctions publiques à l'arrêt de l'olmesartan, en affirmant que cette décision était "entachée d’une erreur manifeste d’appréciation" par les autorités de santé, ainsi que d'erreurs sur la procédure juridique de déremboursement.

Au vu de ces éléments, le Conseil d'Etat a donc ordonné la suspension du déremboursement ainsi que la mise à jour (et non la suspension de diffusion) des documents d’information de l’ANSM et de la HAS, ce qui a été fait le 22 juin 2016.
 
Un arrêté du ministère de la santé et du ministère des finances, publié le 16 juin 2016, fixe la nouvelle date de déremboursement de l’olmesartan au 2 janvier 2017.

L'ANSM et la HAS proposent plusieurs alternatives aux prescripteurs pour remplacer l'olmesartan dans la prise en charge de l'hypertension artérielle.
22 juin 2016 Image d'une montre7 minutes icon Ajouter un commentaire
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La HAS et l'ANSM conseillent d'autres médicaments que l'olmesartan pour la prise en charge de l'hypertension artérielle (illustration).

La HAS et l'ANSM conseillent d'autres médicaments que l'olmesartan pour la prise en charge de l'hypertension artérielle (illustration).


Un abaissement du SMR de l'olmesartan décidé par les autorités de santé au vu de données d'efficacité et tolérance insuffisantes
En 2011 et 2014, deux études ("ROADMAP", Diabetologia 2011, et "ORIENT", Pharmacoepidemiol Drug Saf 2014) comparant l'utilisation de l'olmesartan à un placebo ont constaté une efficacité significative uniquement en termes de réduction des chiffres tensionnels, mais pas en termes de réduction du nombre d'évènements cardiovasculaires (infarctus, accidents vasculaires cérébraux) et de décès.  
 
En outre, le système de pharmacovigilance américain en 2013 (voir notre article de juillet 2013 pour plus de détails), puis une enquête réalisée sur les données de l'Assurance maladie en 2014 ont mis en évidence un risque très rare (< 1/10 000) d'entéropathies graves (diarrhée chronique sévère, perte de poids importante) associé à la prise d'olmesartan.

Ce surrisque d'effets indésirables digestifs n'a pas été retrouvé chez les patients traités par les 6 autres antihypertenseurs de la même classe (sartans : voir notre article de mars 2016).  

Sur la base de ces données d'efficacité et de tolérance, la Commission de la transparence a jugé le service médical rendu (SMR) des spécialités d'olmésartan insuffisant et conduit à leur déremboursement (voir notre article de juin 2015).
 
Un déremboursement recommandé par la HAS en juin 2015, mais officialisé seulement en avril 2016
Suite à l'abaissement du SMR des spécialités à base d'olmesartan et à la demande de déremboursement effectuée par la Commission de la transparence de la HAS, la date de déremboursement effectif a été fixée par un arrêté ministériel publié au Journal Officiel le 3 avril 1016.
 
Cet arrêté a fixé la date d'entrée en vigueur du déremboursement au 3 juillet 2016, avec émission de documents d'information et de bon usage pour les prescripteurs afin qu'ils puissent adapter le traitement de leurs patients sous olmesartan (voir notre article d'avril 2016).
 
Les éléments avancés par les laboratoires pour demander une suspension de ce déremboursement au Conseil d'Etat
Précision préalable : l'ordonnance concernant la demande du laboratoire Daiichi Sankyo n'a pas été mise en ligne. Ce paragraphe reprend donc les informations contenues dans l'ordonnance publiée suite à la demande du laboratoire Menarini France.  A priori, elles devraient être similaires, vu que la décision est la même pour les 2 laboratoires.

Le laboratoirer Menarini explique sa demande de suspension en avançant que la décision de déremboursement au 3 juillet 2016 est trop précoce, étant donné la publication de l'arrêté de déremboursement effective seulement en avril 2016 :  "l'exécution des arrêtés contestés préjudicie de manière grave et immédiate, d'une part, à un intérêt public en ce qu'ils fixent une date de radiation des spécialités à base d'olmésartan « à l'expiration d'un délai de trois mois suivant [leur] publication » qui portre à la santé des patients sous traitement et, d'autre part, à ses intérêts financiers".

Le laboratoire Menarini explique aussi qu'"il existe un doute sérieux sur la légalité de ces arrêtés ministériels, qu'ils sont entachés d'un défaut de motivation", qu'ils méconnaissent la nécessité d'une procédure contradictoire, qu'"ils sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation" (sur l'efficacité et la tolérance de l'olmesartan, ainsi que sur la dégradation "brutale" du SMR) et "d'un détournement de pouvoir, ou tout à le moins d'une erreur de droit".

Le Conseil d'Etat ordonne la suspension du déremboursement pendant au moins 6 mois, mais rejette les autres demandes des laboratoires
Le Conseil d'Etat a donc étudié ces demandes et motivations. Le Conseil d'Etat rappelle que 800 000 patients sont traités en France par olmesartan, dont 90 000 patients de plus de 80 ans. Or "la prescription n'avait diminué que de 10 % près de 2 mois après la publication des arrêtés de déremboursement", souligne le Conseil d'Etat.

Devant ces éléments, le Conseil d'Etat estime que les arguments des laboratoires sur la brièveté du délai et sur les risques liés à l'arrêt brutal de l'olmesartan sont pertinents, et a donc décidé de 
suspendre pour au moins 6 mois l'exécution de l'arrêté du 31 mars 2016 radiant les spécialités à base d'olmesartan de la liste des spécialités remboursables (ordonnances du 13 juin 2016 - lien vers celle concernant le laboratoire Menarini).

Un arrêté publié au Journal officiel le 16 juin 2016 fixe la nouvelle date d'entrée en vigueur du déremboursement au 2 janvier 2017.

Par contre, les autres demandes des laboratoires liées aux motivations
de la décision de déremboursement de l'olmesartan [édit] et demandant la suspension des conseils des autorités de santé pour arrêter l'olmesartan (fiche "Bon usage du médicament" de la HAS[/édit] ont été rejetées par le Conseil d'Etat .
 
Injonction d'une mise à jour des informations par les autorités de santé
Cette décision de suspension du déremboursement est donc assortie d'une injonction à l'ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé) et à la HAS (Haute Autorité de Santé) de mettre  jour leurs documents d'information (et non d'arrêter leur diffusion) et d'y mentionner la nouvelle date de déremboursement.
 
Ces mises à jour ont été effectuées le 22 juin 2016, sur le site de l'ANSM et sur celui de la HAS.  

Les conseils de la HAS pour changer de traitement
 
La fiche "Bon usage du médicament" de la HAS, mise à jour le 22 juin 2016, comporte les informations et conseils suivants :

NE PAS ARRETER BRUTALEMENT SON TRAITEMENT PAR OLMESARTAN.
Les patients ne doivent pas arrêter brutalement leur traitement sans avis médical préalable.

CONSULTER UN MEDECIN AFIN DE CHANGER SON TRAITEMENT.
Lors d'une consultation, les patients discuteront avec leur médecin du traitement antihypertenseur, le plus adapté à leur situation.

IL EXISTE DES NOMBREUSES ALTERNATIVES EFFICACES, MIEUX TOLEREES ET REMBOURSABLES.
Parmi les ARA II, il existe le candésartan (ATACAND, KENZEN et leurs génériques), l'éprosartan  (TEVETEN),  l'irbésartan (APROVEL et ses génériques), le losartan (COZAAR et ses génériques), le telmisartan (MICARDIS, PRITOR et leurs génériques) et le valsartan (NISIS, TAREG et leurs génériques).  La HAS précise cependant que le telmisartan n'a pas démontré son efficacité sur la morbi-mortalité.

Il existe aussi d'autres médicaments inhibiteurs du système rénine-angiotensine : les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC).

Enfin, il existe d'autres médicaments antihypertenseurs appartenant à d'autres classes, recommandés en 1ère intention, qui, selon la situation du patient, pourront être utilisés pour traiter son hypertension artérielle.


Ces alternatives thérapeutiques sont également mentionnées et détaillées dans la VIDAL Reco "Hypertension artérielle", partie "Traitements".
 
Pour mémoire : les spécialités françaises contenant de l'olmesartan

En France, l'olmésartan, seul ou en association avec un autre principe actif, entre dans la composition des médicaments suivants :
  • ALTEIS 10, 20 et 40 mg comprimé pelliculé ;
  • ALTEISDUO 20 mg/12,5 mg, 20 mg/25 mg, 40 mg/12,5 mg et 40 mg/25 mg comprimé pelliculé (en association avec l'hydrochlorothiazide) ;
  • OLMETEC 10 mg, 20 mg et 40 mg comprimé pelliculé ;
  • COOLMETEC 20 mg/12,5 mg, 20 mg/25 mg, 40 mg/12,5 mg et 40 mg/25 mg comprimé pelliculé (en association avec l'hydrochlorothiazide) ;
  • AXELER 20 mg/5 mg, 40 mg/10 mg, 40 mg/5 mg comprimé pelliculé (en association avec l'amlodipine) ;
  • SEVIKAR 20 mg/5 mg, 40 mg/10 mg et 40 mg/5 mg comprimé pelliculé (en association avec l'amlodipine).

Ces médicaments sont fabriqués par les laboratoires Menarini (ALTEIS, ALTEISDUO, AXELER) et Daiichi SAnkyo (OLMETEC, COOLMETEC, SEVIKAR)

En savoir plus :

La décision du Conseil d'Etat, l'arrêté fixant une nouvelle date de déremboursement et les mises à jour sur les sites des autorités sanitaires :
Décision du Conseil d'Etat pour le laboratoire Menarini, reprenant le contenu des ordonnances n° 399765, 399767 et 399772, 13 juin 2016
Arrêté du 16 juin 2016 modifiant l'arrêté du 31 mars 2016 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale
Déremboursement des spécialités à base d'olmésartan dans le traitement de l'hypertension artérielle - Communiqué, ANSM & HAS, 22 juin 2016
Médicaments de l'hypertension artérielle à base d'olmésartan : Pourquoi ne sont-ils plus remboursés ? Quelle conduite à tenir ?, HAS, mars 2016, mise à jour le 22 juin 2016 ; fiche « Bon usage du médicament » pour les spécialités contenant de l'olmesartan.
 
Les études ROADMAP (Randomised Olmesartan and Diabetes Microalbuminuria
Prevention study) et ORIENT (Olmesartan Reducing Incidence of End-stage Renal disease in Diabetic Nephropathy Trial) :
Imai E, Chan J. C. N., Ito S et al. Effects of olmesartan on renal and cardiovascular outcomes in type 2 diabetes with overt nephropathy: a multicentre, randomised, placebo-controlled study. Diabetologia 2011;54:2978–86
Graham DJ, Zhou EH, McKean S et al. Cardiovascular and mortality risk in elderly Medicare beneficiaries treated with olmesartan versus other angiotensin receptor blockers. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2014;23:331-9
 
Autres contenus cités :
Arrêté du 31 mars 2016 portant radiation de spécialités pharmaceutiques de la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale (Journal officiel du 3 avril 2016)
Exposition aux différents sartans et risque d'entéropathies, Compléments apportés à l'étude : Entéropathies associées à la prise d'olmésartan, Myriam Mezzarobba, Alain Weill, Philippe Ricordeau, mars 2014
Spécialités à base d'olmésartan, antagonistes de l'angiotensine II – Avis de la Commission de la transparence, HAS, avril 2015

Sur VIDAL.fr :
Spécialités à base d'olmésartan : déremboursement à partir du 3 juillet 2016 (avril 2016)
Médicaments contenant de l'olmésartan : la HAS recommande le déremboursement en raison d'un sur-risque d'effets indésirables digestifs graves (juin 2015)
Sartans et entéropathies graves : seul l'olmésartan présente un sur-risque (mars 2014)
Olmésartan : cas graves d'entéropathies signalés, appel à la vigilance de la FDA et de l'ANSM (juillet 2013)

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