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Bon usage des médicaments antalgiques opioïdes : le RESPADD publie un guide pratique

Le RESPADD (Réseau de prévention des addictions), associé à l’OFMA (Observatoire français des médicaments antalgiques) et au Réseau français d’addictovigilance, vient de publier un guide pratique à l’usage des prescripteurs visant à fournir des informations et outils pour savoir mieux prescrire et déprescrire les antalgiques opioïdes (également appelés opiacés). 

En 2017, 12 millions de Français ont reçu au moins une prescription d’antalgiques opioïdes. Ce guide rappelle le bon usage de ces antalgiques, en particulier la nécessité de les employer au sein d’un traitement co-analgésique et le fait qu’aucun traitement de fond au long cours ne doit être mené avec des formes injectables ou à libération immédiate.
 
La prévention et le dépistage d’un éventuel mésusage sont détaillés, avec des échelles d’évaluation adaptées.

Des recommandations sont également proposées sur l’usage des antalgiques opioïdes forts : indications, place dans la prise en charge des neuropathies, des lombalgies chroniques et des douleurs arthrosiques des membres inférieurs, mesure de l’efficacité, prévention des effets indésirables.

Enfin, ce guide détaille les mesures à prendre en cas de surdosage.
Stéphane Korsia-Meffre 24 octobre 2018, modifié le 19 novembre 2018 Image d'une montre6 minutes icon Ajouter un commentaire
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Le guide publié par le RESPADD propose aux professionnels les informations nécessaires pour un bon usage des médicaments antalgiques opioïdes.

Le guide publié par le RESPADD propose aux professionnels les informations nécessaires pour un bon usage des médicaments antalgiques opioïdes.


Depuis 2004, le nombre de Français traités par médicaments opioïdes faibles est stable
En 2017, en France, 17,3 % des Français ont reçu au moins une prescription d'antalgiques opiacés (soit 12 millions de personnes, 57 % de femmes, âge moyen 52 ans).

Les chiffres de prescription des opioïdes faibles -dextropropoxyphène, tramadol, codéine, poudre d'opium- sont à peu près stables depuis 2004, la disparition du dextropropoxyphène en 2011 ayant été compensée par une augmentation des prescriptions des autres opioïdes faibles (+103 % pour le tramadol, +124 % pour la codéine et +212 % pour la poudre d'opium). C'est ce que montre ce graphique issu d'une publication récente française (Chenaf C et al. Eur J Pain, juillet 2018) : 



Deux fois plus de Français traités par opioïdes forts depuis 2004
Sur la même période 2004-2017, le nombre de prescriptions d'opioïdes forts (morphine, oxycodone, fentanyl) a augmenté de 120 %, passant de 0,5 à 1,1 % de la population : + 22 % pour la morphine, + 71 % pour le fentanyl et… + 1 350 % pour l'oxycodone (graphique également issu de Chenaf C et al., publication à laquelle ont participé plusieurs auteurs du guide du RESPADD) :



Ainsi, le nombre de Français traités par antalgiques opioïdes forts pour des douleurs non cancéreuses a doublé en 10 ans, rappellent les auteurs du guide faisant l'objet de cet article.
 
2 586 hospitalisations et 207 décès par an liés à une intoxication accidentelle aux opioïdes
En 2017, le taux d'hospitalisations pour intoxication accidentelle aux opioïdes était de 7 cas par jour (2 586 par an), soit 40 hospitalisations pour un million de Français par an. C'est 3,7 fois plus qu'en 1997 et 2,6 fois plus qu'en 2000, selon ce graphique de Chenaf et al. :



Ces accidents sont fréquemment liés à la prescription associée d'autres substances psychotropes, les benzodiazépines par exemple.

Quatre décès par semaine sont rapportés en lien avec une intoxication accidentelle, soit plus de 200 décès par an (3,2 décès pour 1 million de personnes par an, selon ce graphique de Chenaf et al.). Cela représente une augmentation de 172 % entre 2000 et 2015 :



Même si la morphine reste le plus souvent impliquée, ces décès sont parfois dus à des opioïdes faibles (5 à 7 cas par an pour le tramadol). Les décès liés à l'usage de codéine ou d'oxycodone ont doublé entre 2012 et 2016 (respectivement 12 et 6 en 2016).
 
Un guide pour aider à prescrire… et déprescrire les antalgiques opioïdes
Le RESPADD (Réseau de prévention des addictions, une association regroupant plus de 600 établissements de soins), associé à l'OFMA (Observatoire français des médicaments antalgiques) et au Réseau français d'addictovigilance (piloté par l'ANSM), vient de publier un guide pratique à l'usage des prescripteurs : « Médicaments antalgiques opioïdes : ce qu'il faut SAVOIR, ce qu'il faut FAIRE ».

Ce guide, très complet, a pour vocation de donner des informations et des outils pour savoir mieux prescrire et déprescrire les antalgiques opioïdes.

Un rappel des règles de bon usage des antalgiques opioïdes
Ce guide, après avoir rappelé des données d'épidémiologie et le rôle des prescripteurs dans l'addictovigilance (le nombre de cas déclarés a été multiplié par 6 entre 2006 et 2016), rappelle les règles du bon usage des antalgiques opioïdes :
  • diagnostic et évaluation régulière de la douleur ;
  • nécessité d'un traitement co-analgésique (AINS, paracétamol, néfopam) ;
  • titration orale par des opioïdes à libération immédiate, puis relais avec des formes à libération prolongée (aucun traitement de fond au long cours avec des formes injectables ou à libération immédiate) ;
  • explication détaillée du traitement au patient.
 
Prévenir et évaluer un éventuel mésusage des antalgiques opioïdes
Le guide du RESPADD insiste également sur l'importance de la prévention et du dépistage systématique d'un éventuel mésusage, présent chez 21 à 29 % des personnes traitées par des opioïdes pour soulager des douleurs chroniques.

Pour cela, il recommande :

Selon le RESPADD, le mésusage est plus fréquent :
  • chez les patients pour qui l'antalgie prescrite est insuffisante ;
  • chez ceux qui ont reçu une prescription d'opioïdes faibles avant celle d'opioïdes forts ;
  • chez les patients jeunes ;
  • chez ceux qui ont des antécédents de maladie psychiatrique ou de problèmes d'usage avec des substances psychotropes.

Des profils de mésusage sont donnés pour chaque substance opioïde à partir des données du Réseau français d'addictovigilance. Face à une addiction ou un mésusage probable d'un opioïde fort, il est recommandé de demander un avis spécialisé (addictologue, centre d'évaluation et de traitement de la douleur, psychiatre).
 
Des recommandations sur les indications des antalgiques opioïdes forts
Le guide du RESPADD propose une série de recommandations qui ont pour but de répondre aux deux questions suivantes :
  • quels sont les bénéfices et indications des opioïdes forts dans les douleurs chroniques non cancéreuses ?
  • quels sont les risques et les précautions à prendre lors de l'utilisation des opioïdes forts dans les douleurs chroniques non cancéreuses ?

En termes d'indications, ces recommandations limitent l'usage des opioïdes forts aux douleurs arthrosiques des membres inférieurs, aux lombalgies chroniques réfractaires (discopathie dégénérative, spondylolisthésis, hernie discale ou canal lombaire étroit) et aux douleurs neuropathiques périphériques ou centrales.

Des traitements de première intention, précisés pour chaque indication, sont à initier avant la prescription d'opioïdes forts.

Les maladies dites dysfonctionnelles, et notamment la fibromyalgie, ainsi que les céphalées primaires et notamment la migraine, ne devraient pas être des indications pour les opioïdes forts.
 
Des recommandations sur l'évaluation de l'efficacité d'un opioïde fort
Les experts du RESPADD précisent que le seuil de 30 % d'amélioration ou une réduction de 2 points sur une échelle de 10 points sont considérés comme une amélioration modérée, mais cliniquement significative de la douleur.

Tous les opioïdes forts semblent similaires en terme d'efficacité, quelle que soit l'indication.

Le choix doit donc prendre en considération la facilité de titration, le coût, les effets indésirables présentés par le patient, les données actuelles de la science, les AMM et le remboursement du traitement.

Il n'est pas recommandé de poursuivre un opioïde fort au delà de 3 mois en l'absence de bénéfice sur au-moins l'un des aspects suivants : soulagement de la douleur, amélioration de la fonction et de la qualité de vie.

L'arrêt de traitement par opioïdes forts pour effets indésirables est plus fréquent que l'arrêt pour inefficacité. Il est donc fortement recommandé de prévenir les effets indésirables les plus fréquents (constipations, nausées, vomissements) par un traitement symptomatique anticipé, systématiquement proposé sur l'ordonnance.
 
Le guide du RESPADD couvre également le sujet du diagnostic du syndrome de sevrage, ainsi que l'attitude à adopter face à une surdose aux opioïdes, en particulier l'usage de la naloxone injectable ou en spray.

Un chapitre particulier est consacré au sulfate de morphine (ACTISKENAN, MOSCONTIN, SKENAN), à son mésusage et à la réduction des risques en cas de mésusage.
 
 
Pour aller plus loin
 
Le guide pratique publié par le RESPADD, l'OFMA et le Réseau français d'addictovigilance
« Médicaments antalgiques opioïdes : ce qu'il faut SAVOIR, ce qu'il faut FAIRE », RESPADD, octobre 2018.
 
La publication dont sont issus les graphiques illustrant les données d'épidémiologie, publication à laquelle ont participé plusieurs auteurs du guide : 
C. Chenaf, J.-L. Kabore, J. Delorme, B. Pereira, A. Mulliez, M. Zenut, N. Delage, D. Ardid, A. Eschalier, N. Authier. Prescription opioid analgesic use in France: Trends and impact on morbidity–mortality, European Journal of Pain, juillet 2018


L'échelle de mesure du risque de mésusage des opioïdes ORT
 
L'échelle d'évaluation du mésusage des opioïdes POMI
 
Le site du RESPADD
 
Le site de l'OFMA
 
Le site du Réseau français d'addictovigilance


Sur VIDAL.fr 

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