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IEC, sartans, gliptines : attention au risque d'angiœdème bradykinique

L'ANSM met en garde les professionnels de santé et les patients sur le risque d'angiœdème bradykinique associé aux classes de médicaments suivantes :  L'association de ces médicaments entre eux majorent le risque d'angiœdème bradykinique.

Cet effet indésirable est imprévisible et potentiellement grave. Principalement localisé au niveau du visage et de la sphère ORL, il est associé à un haut risque d'asphyxie en cas de localisation laryngée. 

Le diagnostic d'angiœdème bradykinique d'origine médicamenteuse est difficile, en raison notamment de l'absence de marqueurs biologiques et d'un mode évolutif très variable d'un patient à l'autre. 

En cas d'angiœdème bradykinique chez des patients traités par IEC ou sartans, le traitement doit être arrêté immédiatement et ne plus jamais être prescrit. 
Les patients traités par sartans ou IEC et qui présentent des signes évocateurs d'angiœdème bradykinique (décrits dans l'article ci-dessosu) doivent consulter leur médecin en urgence. 
David Paitraud 14 novembre 2019 Image d'une montre4 minutes icon Ajouter un commentaire
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En cas d'angiœdème de la face, la localisation laryngée est à haut risque d'asphyxie (illustration).

En cas d'angiœdème de la face, la localisation laryngée est à haut risque d'asphyxie (illustration).


Dans un point d'information en date du 12 novembre 2019, l'ANSM (Agence nationale du médicament et des produits de santé) alerte les professionnels de santé sur le risque d'angiœdème bradykinique d'origine médicamenteuse, associé à plusieurs classes médicamenteuses. 

Médicaments à risque d'angiœdème bradykinique : IEC, sartans et gliptines 
Ce point d'information de l'ANSM fait suite au signalement de cas d'angiœdème bradykinique survenus chez des patients traités par les classes de médicaments suivants (cf. Tableau I) :

L'association d'un IEC ou d'un sartan à certains médicaments majorant la concentration de bradykinine, notamment les inhibiteurs de la dipeptidylpeptidase IV (famille des gliptines) augmente le risque d'angiœdème bradykinique.

Tableau  I - Les classes pharmacologiques à risque d'angiœdème bradykinique et leurs principes actifs
Inhibiteurs de l'enzyme de conversion – IEC Bénazépril, captopril, cilazapril (supprimé en France), delapril (non commercialisé en France), énalapril, fosinopril, imidapril (supprimé en France), lisinopril, périndopril, trandolapril, zofénopril
Antagoniste des récepteurs de l'angiotensine II – ARA II (sartans) Azilsartan (non commercialisé en France), candésartan, éprosartan, irbésartan, losartan, olmésartan, telmisartan, valsartan
Gliptines Alogliptine (non commercialisé en France), linagliptine (non commercialisé en France), saxagliptinesitagliptine, vildagliptine

À noter que le risque d'angiœdème est mentionné dans les RCP (résumés des caractéristiques du produit) des médicaments contenant un IEC (rubriques "Mises en garde et précautions d'emploi" et "Effets indésirables"). 

Une accumulation de bradykinine par défaut de dégradation
L'ANSM explique que les angiœdèmes bradykiniques (AEB) surviennent par défaut de dégradation de la bradykinine et distingue deux étiologies : 
  • l'une héréditaire (associée ou non à un déficit en C1 inhibiteur) ;
  • l'autre médicamenteuse par inhibition d'enzymes qui dégradent la bradykinine, en particulier l'enzyme de conversion pour les IEC ou les ARA II (sartans) et la dipeptidylpeptidase pour les gliptines.

Le principal diagnostic différentiel de l'AEB est l'angiœdème IgE médié (cf. Figure 1), dont il se distingue notamment par le fait qu'il n'est pas associé à une urticaire ou à d'autres manifestations évoquant une anaphylaxie : l'AEB est isolé.
 
Figure 1 - Classification des angiœdèmes selon le mécanisme physiopathologique 
(d'après : Julia Crochet. Angiœdèmes histaminiques versus bradykiniques : mortalité par asphyxie. Médecine humaine et pathologie. 2017. ffdumas-01589629

Un diagnostic difficile à établir
L'aspect clinique des angiœdèmes étant similaire, le diagnostic étiologique est parfois difficile à établir, surtout en cas d'angiœdème isolé (cf. Tableau II).
Plus déformant que l'angiœdème IgE médié, l'AEB se manifeste le plus souvent par des œdèmes de l'hypoderme, non prurigineux, d'apparition brutale, localisés principalement au niveau du visage et de la sphère ORL (la langue ou les voies aériennes supérieures).
Une atteinte laryngée est rapportée dans 30 % des cas d'angiœdème de la face chez un patient traité par IEC ou plus rarement par sartan. La localisation laryngée est à haut risque d'asphyxie. 
L'AEB peut aussi être localisé au niveau de la muqueuse digestive, et se traduit par des douleurs abdominales d'intensité variable.
La survenue de l'AEB est imprévisible. Les délais d'apparition vont de quelques heures à plusieurs années après le début du traitement.

Tableau II - Caractéristiques des AE bradykiniques d'origine médicamenteuse
Délai de survenue Quelques heures à plusieurs années après le début du traitement.
Apparition des signes cliniques Quelques heures ou plusieurs jours.
Manifestations cliniques Œdème déformant, majoritairement au niveau de la face et ORL.
Des manifestations digestives sont également rapportées. Absence d'urticaire ou de manifestation d'ordre anaphylactique (à la différence de l'AE par histaminolibération).
Évolution Régression spontanée malgré la poursuite du traitement
Haut risque d'asphyxie en cas de localisation laryngée.
Récidive Crises récidivantes possibles, avec accroissement de la sévérité.
Une récidive est possible dans les 6 mois suivant l'arrêt de l'IEC ou du sartan.
Paramètre biologique Les taux de C1 inhibiteur (pondéral ou fonctionnel) et de C4 restent normaux (contrairement aux formes héréditaires ou acquises d'angiœdèmes bradykiniques).
 
Conduite à tenir : arrêt du traitement à vie et information du patient
L'apparition d'un angiœdème bradykinique chez un patient traité par IEC ou ARA II doit conduire à l'arrêt immédiat du médicament et à sa contre-indication à vie.

L'ANSM recommande par ailleurs de sensibiliser le patient sous IEC ou sartan à cet effet secondaire, aux signes d'alerte et à la conduite à tenir : 
  • signes cliniques de l'angiœdème : gonflement de la face, des lèvres, de la langue ou de la gorge, difficultés à avaler ou à respirer et/ou douleurs abdominales d'intensité variée ;
  • conduite à tenir : consultation médicale en urgence.

Pour aller plus loin
Angioedème bradykinique : penser aux inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) mais aussi aux antagonistes des récepteurs de l'angiotensine II (sartans) et aux gliptines - Point d'Information (ANSM, 12 novembre 2019)
Angiœdème bradykinique secondaire aux inhibiteurs de l'enzyme de conversion : instaurer le traitement en préhospitalier (Annales françaises d'anesthésie et de réanimation - novembre 2011)

Julia Crochet. Angioedèmes histaminiques versus bradykiniques : mortalité par asphyxie. Médecine humaine et pathologie. 2017. ffdumas-01589629

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