Le gouvernement adapte les conditions de réalisation de l'IVG médicamenteuse en ville durant la période d'épidémie de COVID-19 (illustration)
La situation sanitaire actuelle et le confinement imposé à la population sont susceptibles de mettre en péril les droits des femmes à l'IVG (interruption volontaire de grossesse).
Afin de garantir la continuité de ce droit, le ministère des Solidarités et de la Santé a demandé une adaptation provisoire du protocole de l'IVG médicamenteuse pratiquée en ville, en termes d'organisation et de mise à disposition des médicaments.
Pour répondre à cette demande, la HAS (Haute Autorité de Santé) a émis des recommandations provisoires relatives à l'IVG médicamenteuse pratiquée en dehors des établissements de santé.
Un arrêté ministériel du 14 avril 2020 vient encadrer les modalités pratiques de cette intervention, pendant l'épidémie de COVID-19.
Une IVG possible en ville jusqu'à 9 semaines d'aménorrhée
Première évolution, le délai autorisé pour pratiquer une IVG médicamenteuse en ville passe de 7 à 9 semaines d'aménorrhée (7 semaines de grossesse). Cet allongement a été validé par la HAS et confirmé dans l'arrêté du 14 avril 2020.
Cette mesure provisoire doit ainsi permettre de répondre à la demande des femmes tout en ménageant les ressources des établissements de santé.
Les professionnels de santé libéraux autorisés à pratiquer une IVG médicamenteuse (médecins et sages-femmes ayant une convention avec un établissement de santé) peuvent donc prendre en charge les femmes qui font ce choix à la 8e et à la 9e semaine d'aménorrhée (de 50 à 63 jours d'aménorrhée), en respectant le protocole établi par la HAS.
La HAS rappelle que le choix de la méthode, IVG médicamenteuse ou chirurgicale, revient à la femme.
Stratégie médicamenteuse : mifépristone et misoprostol par voie orale
Pour l'IVG médicamenteuse réalisée au-delà de la 7e semaine d'aménorrhée (à 8 ou 9 semaines), deux protocoles associant la mifépristone (antiprogestérone) et le misoprostol (prostaglandine utilisée hors AMM) sont recommandés :
- 200 mg de mifépristone (MIFEGYNE 200 mg) par voie orale suivie, 24 à 48 h plus tard, de 800 µg de misoprostol (GYMISO 200 µg ou MISOONE 400 µg) par voie orale, sublinguale ou jugale ;
- 600 mg de mifépristone (MIFEGYNE 600 mg) par voie orale suivie 24 à 48 h plus tard, de 800 µg de misoprostol par voie orale, sublinguale ou jugale.
Ce protocole ne prévoit pas l'utilisation du géméprost par voie vaginale (CERVAGEME) pour une IVG médicamenteuse en 8e et 9e semaine d'aménorrhée pratiquée hors établissement de santé.
La HAS précise que l'administration par voie vaginale de comprimés de misoprostol destinés à la voie orale est à proscrire.
IVG et douleur : adapter la stratégie antalgique en période de COVID-19
L'IVG médicamenteuse est associée à des douleurs importantes de type abdominopelviennes, dont la prise en charge peut être anticipée avec un traitement antalgique adapté.
Hors période COVID-19, l'ibuprofène est l'antalgique de référence dans l'IVG médicamenteuse. Cependant, en raison des risques possibles d'aggravation de la COVID-19 avec les AINS, la HAS recommande d'utiliser le paracétamol associé à l'opium ou à la codéine.
Organisation de l'IVG médicamenteuse en ville en période de COVID-19 : la téléconsultation à privilégier
En complément des recommandations de la HAS, les professionnels de santé peuvent s'appuyer sur les recommandations provisoires du CNGOF (Collège national des gynécologues et obstétriciens français), spécifiques à l'organisation de l'IVG médicamenteuse en ville, en période de COVID-19 et de confinement :
- pour la première consultation (consultation pré-IVG), privilégier la téléconsultation à la consultation présentielle, sauf cas particulier. Les ordonnances et autres documents sont transmis par voie dématérialisée à la patiente ou aux soignants et pharmacien si besoin ;
- si une femme se présente au cabinet, fusionner la consultation pré-IVG et la consultation IVG ;
- tenir compte des signes évoquant une infection au SARS-CoV-2 et appliquer les recommandations pour limiter la contamination des autres patientes et des soignants ;
- réaliser la consultation de contrôle par téléconsultation, 15 à 21 jours après la prise des médicaments. Pour cela, le CNGOF a demandé au laboratoire Nordic la mise à disposition gratuite du dispositif CheckTop (test urinaire rapide de basse sensibilité - seuil de détection de béta-HCG supérieur ou égal à 1 000 UI) en ville, pour remise à la patiente par le pharmacien d'officine le jour de la délivrance des médicaments. Ce dispositif permet de contrôler le succès/échec de l'IVG. Le laboratoire Nordic met en garde contre le risque de confusion de ce test spécifique avec un test de grossesse classique (dont le taux de détection de béta HCG est supérieur ou égal à 5 MUI). EDIT du 16 avril 2020 : la mise à disposition de CHECKTOP est effective sur l'ensemble du territoire national (métropole et DROM), pour toutes les officines qui en font la demande. La commande doit être passée auprès de CSP. Le médecin ou la sage-femme ne peuvent pas faire de commande directe, ils doivent passer par le pharmacien d'officine /FIN EDIT.
Dispensation des médicaments de l'IVG : les modalités assouplies par l'arrêté du 14 avril 2020
Hors période COVID-19, les médicaments utilisés en ville dans le cadre de l'IVG médicamenteuse sont réservés à l'usage professionnel. Ils ne doivent pas être remis directement aux patientes ; la délivrance est assurée par le médecin ou la sage-femme. L'administration (première prise) doit être réalisée en présence de ces professionnels (article R2212-17 du code de la Santé publique).
La situation actuelle liée à l'épidémie de COVID-19 conduit à un assouplissement de cette réglementation.
L'arrêté du 14 avril 2020 prévoit les dispositions suivantes :
- administration du médicament : la première prise des médicaments nécessaires à l'IVG peut être effectuée dans le cadre d'une téléconsultation avec le médecin ou la sage-femme,
- prescription : le prescripteur doit mentionner sur l'ordonnance le nom de la pharmacie désignée par la patiente pour la dispensation de ces médicaments,
- dispensation : à partir de la prescription transmise par le médecin ou la sage-femme par voie numérique, le pharmacien peut exceptionnellement délivrer ces médicaments à la patiente, dans un conditionnement adapté à la prise individuelle. Il appose sur l'ordonnance le timbre de la pharmacie d'officine, la date de délivrance, les numéros d'enregistrement et la mention "délivrance exceptionnelle", et informe le prescripteur de la délivrance des médicaments nécessaires à l'IVG médicamenteuse.
Ces dispositions sont applicables sous réserve du consentement libre et éclairé de la femme, et si son état de santé le permet.
L'arrêté du 14 avril 2020 décrit également les modalités de facturation de ces médicaments (habituellement, cette facturation est assurée par le médecin ou la sage-femme dans le cadre du forfait IVG médicamenteuse) :
- la délivrance des médicaments à la patiente s'effectue sans frais et anonymement ;
- le pharmacien facture aux organismes d'Assurance maladie les spécialités pharmaceutiques (cf. Tableaux I et II) sur la base du montant du sous-forfait médicaments, auquel s'ajoute un montant fixe de 4 euros d'honoraires pour cette dispensation particulière applicable en métropole et dans les départements et régions d'outre-mer ;
- le pharmacien transmet la prescription et la facture d'achat des médicaments.
Tableau I - IVG médicamenteuse pratiquée avant la 6e semaine de grossesse
(avant la 8e semaine d'aménorrhée) : détail de la facturation (en euros)
(avant la 8e semaine d'aménorrhée) : détail de la facturation (en euros)
Spécialités délivrées/ PPTTC* | Métropole | La Réunion | Guyane | Martinique | Guadeloupe | Mayotte |
Présentations | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* |
Mifépristone | ||||||
MIFEGYNE 200 mg comprimé 3 plaquettes de 1 comprimé Code CIP : 3400936513471 |
70,61 | 89,25 | 94,62 | 93,42 | 93,42 | 96,03 |
MIFEGYNE 600 mg comprimé 1 plaquette de 1 comprimé Code CIP : 3400930042168 |
||||||
MIFFEE 200 mg comprimé
1 plaquette de 1 comprimé
Code CIP : 3400926767822 |
||||||
Misoprostol | ||||||
GYMISO 200 µg comprimé 1 plaquette de 2 comprimés Code CIP : 3400936249943 |
12,96 | 16,38 | 17,37 | 17,15 | 17,15 | 17,63 |
MISOONE 400 µg comprimé sécable
1 plaquette thermoformée polyamide aluminium PVC-aluminium de 1 comprimé
Code CIP : 3400927426681
|
||||||
Géméprost | ||||||
CERVAGEME 1 mg ovule
1 plaquette de 1 ovule
Code CIP : 3400932730469
|
12,96 | 16,38 | 17,37 | 17,15 | 17,15 | 17,63 |
Total (€) du montant du sous forfait médicament à facturer par le pharmacien dans le cas d'une IVG médicamenteuse pratiquée avant le début de la 6e semaine de grossesse | 83,57 | 105,63 | 111,98 | 110,56 | 110,56 | 113,66 |
Montant fixe de l'honoraire de dispensation à facturer en plus du sous forfait | 4 | 4 | 4 | 4 | 4 | 4 |
Total : sous forfait + honoraire | 87,57 | 109,63 | 115,98 | 114,56 | 114,56 | 117,66 |
*prix public toutes taxes comprises
Tableau II - IVG médicamenteuse pratiquée à partir de la 6e semaine de grossesse et jusqu'à la fin de la 7e semaine de grossesse (8e et 9e semaines d'aménorrhée) : détail de la facturation (en euros)
Spécialités délivrées/ PPTTC* | Métropole | La Réunion | Guyane | Martinique | Guadeloupe | Mayotte |
Présentation/ conditionnement | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* | PPTTC* |
Mifépristone | ||||||
MIFEGYNE 200 mg comprimé 3 plaquettes de 1 comprimé Code CIP : 3400936513471 |
70,61 | 89,25 | 94,62 | 93,42 | 93,42 | 96,03 |
MIFEGYNE 600 mg comprimé 1 plaquette de 1 comprimé Code CIP : 3400930042168 |
||||||
MIFFEE 200 mg comprimé 1 plaquette de 1 comprimé Code CIP : 3400926767822 |
||||||
Misoprostol | ||||||
GYMISO 200 µg comprimé 1 plaquette de 2 comprimés Code CIP : 3400936249943 |
12,96 | 16,38 | 17,37 | 17,15 | 17,15 | 17,63 |
MISOONE 400 µg comprimé sécable
1 plaquette thermoformée polyamide aluminium PVC-aluminium de 1 comprimé
Code CIP : 3400927426681 |
||||||
Total (€) du montant du sous forfait médicament à facturer par le pharmacien, le médecin ou la sage-femme dans le cas d'une IVG médicamenteuse pratiquée à partir du début de la 6e et jusqu'à la fin de la 7e semaine de grossesse | 96,53 | 122,01 | 129,36 | 127,72 | 127,72 | 131,29 |
Montant fixe de l'honoraire de dispensation à facturer en plus du sous forfait par le pharmacien | 4 | 4 | 4 | 4 | 4 | 4 |
Total : sous forfait + honoraire | 100,53 | 126,01 | 133,36 | 131,72 | 131,72 | 135,29 |
Pour aller plus loin
Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) médicamenteuse à la 8ème et à la 9ème semaine d'aménorrhée (SA) hors milieu hospitalier (HAS, 10 avril 2020)
Réponses rapides dans le cadre du COVID-19 - Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) médicamenteuse à la 8ème et à la 9ème semaine d'aménorrhée (SA) hors milieu hospitalier (HAS et CNGOF, 9 avril 2020)
Arrêté du 14 avril 2020 complétant l'arrêté du 23 mars 2020 prescrivant les mesures d'organisation et de fonctionnement du système de santé nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire (Journal officiel du 15 avril 2020 - texte 12)
Prise en charge des IVG médicamenteuses à domicile durant l'épidémie de COVID (CNGOF, avril 2020)
Documents publiés par la DGS - avril 2020
Consultations de télémédecine pour les IVG médicamenteuses avant 9 SA pour les femmes mineures (ministère de la Santé, avril 2020)
Consultations de télémédecins pour les IVG médicamenteuses avant 9 SA pour les femmes majeures (ministère de la Santé, avril 2020)
IVG médicamenteuse : condition de délivrance des médicaments aux femmes dont les mineures à l'officine (ministère de la Santé, avril 2020)
Pour aller plus loin
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