Une technique utilisée dans certains centres référents.
La neurostimulation médullaire est une technique à visée antalgique dont le mécanisme d’action est connu depuis près de cinquante ans et qui a fait la preuve de son efficacité.
Elle nécessite une intervention chirurgicale effectuée par un neurochirurgien ou un anesthésiste spécialisé dans les centres référents. Une électrode est introduite dans l’espace épidural puis elle est activée par un générateur de stimulation placé sous la peau.
Cette technique est principalement proposée pour les douleurs chroniques évoluant depuis au moins six mois à un an, soit neuropathiques par atteinte du système nerveux périphérique, soit séquellaires après chirurgie du dos, ou dans les cas de syndromes régionaux complexes (algodystrophie) réfractaires.
Tous les patients ne sont cependant pas éligibles. L’indication doit être posée dans un centre d’évaluation et de traitement de la douleur après évaluation par une équipe pluridisciplinaire.
L’amélioration est obtenue dans 50 à 80 % selon les situations.
Le système peut être gardé à vie, mais s’agissant d’une technique réversible, il peut être retiré secondairement si nécessaire ou selon le souhait du patient.
Le Dr Hayat Belaid, neurochirurgien et spécialiste en évaluation et traitement de la douleur à l'hôpital Fondation Adolphe de Rothschild (Paris), fait le point sur la question.
Maladies rares info services. Quelles sont les indications de la neurostimulation médullaire ?
Dr Hayat Belaid. Les principales indications actuelles sont :
- les douleurs neuropathiques chroniques, d’une durée d’au moins six mois, par atteinte du système nerveux périphérique (origine diabétique, traumatique, chirurgicale, neuropathie à petites fibres, zona…) ;
- les douleurs qui persistent après chirurgie du dos (hernie discale lombaire, canal lombaire étroit, arthrodèse...) ;
- les syndromes douloureux régionaux complexes (algodystrophie) des membres supérieurs ou inférieurs, réfractaires aux traitements conventionnels ;
La douleur chronique d'origine ischémique, secondaire à une maladie de Buerger, après échec des autres options thérapeutiques, fait également partie des indications.
Les artériopathies oblitérantes des membres inférieurs (si aucun geste vasculaire n’est retenu) sont aussi une indication reconnue en Europe, mais ne font pour l’instant pas partie des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) en France.
En pratique, quels sont les patients éligibles ?
Tous les patients souffrant de douleurs chroniques ne sont pas éligibles à une neurostimulation médullaire.
L’indication est posée dans un centre d’évaluation et de traitement de la douleur (CETD) après une évaluation pluridisciplinaire globale. Ce temps est essentiel. Le patient va rencontrer plusieurs intervenants : infirmière coordonnatrice, psychologue (une évaluation psychologique est nécessaire), médecin spécialiste de la douleur, chirurgien et/ou anesthésiste. Il faut bien lui expliquer les enjeux de cette technique, les bénéfices attendus, les contraintes et les limites. Cette procédure nécessite une intervention chirurgicale avec pose de matériel que la personne va garder plusieurs années, voire à vie, et présente donc un caractère invasif.
Par ailleurs, il faut préciser que, même dans la meilleure des indications, il n’y aura pas de retour « à une vie exactement comme avant les douleurs ».
Enfin, s’il est indispensable que l’indication soit correctement posée, il faut également que ce soit le bon moment pour le patient et que la préparation médicale et psychologique soit adaptée et personnalisée. Il est notamment important qu'il se prépare au mieux aux changements apportés et à la période de transition périopératoire.
Quels sont les taux d’efficacité ? Quelle association avec les traitements médicamenteux ?
La neurostimulation médullaire a fait la preuve de son efficacité depuis très longtemps.
Pour rappel, il s’agit d’un traitement symptomatique qui utilise une impulsion électrique délivrée par des électrodes positionnées en regard, mais à l’extérieur, de la moelle épinière. Ce faible courant électrique va moduler les circuits neuronaux de la moelle épinière jusqu’aux régions du cerveau impliquées dans la douleur chronique et ainsi atténuer la sensation de douleur. La neurostimulation ne supprime pas la source de douleur, mais elle masque les symptômes douloureux. Ce mécanisme d’action est connu depuis près de cinquante ans et cette technique est complètement remboursée par la Sécurité sociale depuis plus de vingt ans.
Au départ, la neuromodulation était considérée comme une option thérapeutique de dernier recours. Mais maintenant, on la propose beaucoup plus tôt, dès qu’il n’y a pas de réponse aux traitements médicamenteux (antiépileptiques, antidépresseurs, opioïdes) avant d’être en impasse thérapeutique totale. Il a d’ailleurs été démontré dans la littérature que cette technique est d’autant plus efficace qu’elle est proposée précocement. De plus, dans ces indications de douleurs chroniques, on sait que les morphiniques au long cours sont non seulement inefficaces, à cause notamment d’un phénomène de tolérance qui nécessite une augmentation des doses, mais aussi délétères (cf. la crise sanitaire aux États-Unis).
L’implantation définitive d’une neuromodulation est conditionnée à une réduction des douleurs d’au moins 50 % (objectivée par des échelles de mesure validées).
En pratique, la réponse est très variable selon les patients et en fonction des indications. Le taux d’efficacité attendu de la neuromodulation est en moyenne de 50 %.
Chez certaines personnes, l’amélioration peut être bien supérieure et atteindre de 80 à 90 % avec reprise d’une vie active et professionnelle quasiment normale et diminution, voire dans certains cas arrêt total, ou utilisation ponctuelle, des autres traitements antidouleurs.
Chez d’autres, la situation est un peu plus complexe, car la douleur chronique peut s’associer à d’autres pathologies comme un syndrome anxio-dépressif et, dans ce contexte-là, un traitement médicamenteux associé est souvent conservé. Mais il est possible de l’alléger et de diminuer les douleurs, globalement de 50 %.
Quelles ont été les dernières avancées concernant cette technique ?
Les progrès ont d’abord concerné la fiabilité et la robustesse du matériel, les générateurs de stimulation (piles) que l’on peut recharger par une ceinture externe (changements tous les dix-douze ans désormais sous anesthésie locale) et la compatibilité IRM des systèmes.
Plus récemment, le progrès majeur concerne le développement de nouveaux modes de stimulation, qui peuvent être combinés entre eux avec un effet synergique. En effet, il n’existait auparavant qu’un seul mode de stimulation, de type « tonique », perçu sous forme de fourmillements agréables qui masquaient la douleur. Du fait notamment d’électrodes plus fines avec plus de contacts, nous pouvons aujourd’hui délivrer différents types de stimulations qui permettent un très haut niveau de personnalisation et de confort pour le patient (stimulations que l’on ressent ou non, continues ou cycliques…).
Quels sont les effets secondaires ?
Le principal risque est infectieux, de l’ordre de 3 %. Ce sont les sujets fragiles et/ou diabétiques ayant un système immunitaire affaibli qui sont les plus à risque. La survenue d’une infection nécessite l’ablation du matériel pour le réimplanter ensuite, associé à un traitement antibiotique. Mais le système en lui-même peut être gardé à vie. Une fois que le matériel est implanté et qu’il n’y a pas eu de complication postopératoire, il n’y a ni dépendance, ni effets secondaires à craindre.
Il peut y avoir des dysfonctionnements ou déplacements de matériel, mais ceux-ci sont devenus rares avec les progrès réalisés sur le matériel qui est plus robuste.
Comment les électrodes sont-elles implantées ?
L’implantation est effectuée par un neurochirurgien ou par un anesthésiste spécialisé.
Les neurochirurgiens pratiquent le plus souvent une voie d’abord neurochirurgicale sous anesthésie générale avec une petite incision : l’électrode (plate) est positionnée dans l’espace épidural (encore appelé espace péridural ou extradural) entre la dure-mère et la vertèbre. L’opération dure moins d’une heure.
L’intervention peut aussi se faire par voie percutanée sous anesthésie locale et sous contrôle radiologique par certains neurochirurgiens et les anesthésistes.
Elle se fait toujours en deux temps avec une première phase obligatoire de test où seule l’électrode est implantée. Cette première étape permet de vérifier que la stimulation va être réellement bénéfique avant d’implanter le générateur de stimulation dans un second temps :
- dans le premier temps opératoire, l’électrode est reliée à un boîtier externe et le patient dispose d’une télécommande pour ajuster les paramètres qui ont été préprogrammés. Il retourne chez lui pendant plusieurs jours pour tester les effets de la neurostimulation en continu.
- puis il revient en hospitalisation et le petit générateur de stimulation est mis en place sous la peau au niveau de l’abdomen ou de la fesse.
L’implantation définitive d’une neuromodulation est généralement conditionnée à une réduction des douleurs en moyenne de 50 % (objectivée par des échelles de mesure validées), bien que le résultat soit parfois nettement supérieur (dépendant du type de douleurs et de leur durée d’évolution).
Quels sont les centres antidouleur en France pouvant indiquer cette technique et la mettre en œuvre ?
La neurostimulation médullaire ne se pratique que dans certains centres référents par des anesthésistes ou des neurochirurgiens formés et disposant du plateau technique nécessaire. Elle est accessible dans tous les CHU des grandes villes françaises ainsi que dans certaines cliniques. Si un médecin se pose la question d’une éventuelle indication pour un patient, il peut le référer pour avis dans un tel centre.
Comment se passe le traitement après l’implantation ?
Une fois que le matériel a été implanté, il y a une première consultation à un mois pour vérifier la cicatrisation et ajuster les paramètres de stimulation. Puis, en général, on revoit les patients au troisième mois et au sixième mois. Une fois que le traitement est efficace et que l’on a pu diminuer les autres médicaments, le suivi est annuel.
Quel est le coût de ce traitement et le remboursement ?
Ce traitement est totalement remboursé par la Sécurité sociale. Même si le matériel est très coûteux (environ 20 000 euros), des études médico-économiques ont montré qu’en deux ans le coût est amorti. Cette procédure revient en effet moins chère que d’autres traitements, car elle permet de diminuer le nombre de consultations, les examens complémentaires, les traitements médicamenteux, les hospitalisations et les arrêts de travail.
Interview réalisée par le Dr Laurence Houdouin, responsable médicale à Maladies rares info services.
bjr suite à une mauvaise prise en charge aux urgences CHU GASTON RAMOND 89100SENS opérée après 3 mois d'attente d'une hernie discale L4-L5 remontante et paralisante touchant la dure maire opérée le 01/03/23 rééducation de 1 mois ma jambe manque de réaction au relevage du pied et douleur persistante dessus du tibia la neurostimulation médulaire pourait elle apporter une amélioration pour la marche et contre la douleur nocturne
Bonjour,
Pour ce problème moteur et cette douleur il faut en parler aux médecins qui vous suivent. Quant à la neurostimulation médullaire, c'est une technique principalement proposée pour les douleurs chroniques évoluant depuis au moins six mois à un an (comme expliqué dans l'article).
Cettetechnique peut elle adaptée à une névragie du nerf d'arnold persistante.
merci pour votre réponse
Cordialement
Réponse du Dr H. Belaid.
Il existe en effet des électrodes dédiées pour la névralgie d'arnold (de même que pour l'algie vasculaire de la face),que l'on positionne au niveau occipital en sous-cutané. Cela fonctionne avec de bons résultats dans les cas rebelles aux traitements médicamenteux.