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BEYFORTUS : les données des essais d’efficacité et de tolérance chez l’enfant

L’autorisation de mise sur le marché de BEYFORTUS, un anticorps monoclonal indiqué dans la prévention de la bronchiolite à virus respiratoire syncytial chez les nouveau-nés et les nourrissons, s’appuie sur les résultats de plusieurs études.

Élisabeth LECA 14 septembre 2023 Image d'une montre18 minutes icon Ajouter un commentaire
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Ne pas oublier les mesures d'hygiène.

Ne pas oublier les mesures d'hygiène.

Résumé

Un anticorps monoclonal, le palivizumab (SYNAGIS, une administration mensuelle en intramusculaire [IM] pendant toute la durée de la saison épidémique), est disponible depuis plus de vingt ans, en prévention des bronchiolites liées au virus respiratoire syncytial (VRS) chez les enfants les plus vulnérables (prématurés, enfants atteints de dysplasie bronchopulmonaire ou de cardiopathie congénitale…).

La décision récente de mise sur le marché de BEYFORTUS (nirsévimab, 1 injection IM), un nouvel anticorps monoclonal indiqué pour la prévention des infections des voies aériennes inférieures liées au VRS chez tous les nouveau-nés et nourrissons confrontés à leur première saison de circulation du virus, s’appuie sur l’analyse de quatre études.

Deux ont comparé l’efficacité de ce nouvel anticorps monoclonal contre placebo dans deux populations différentes : des nourrissons, soit nés à terme ou prématurés, soit grands prématurés.

Une étude de pharmacocinétique et de tolérance a aussi comparé le nirsévimab et le palivizumab chez des nourrissons prématurés ou ayant une cardiopathie congénitale ou bien une pneumopathie chronique.

Un dernier essai, non examiné dans le cadre de l’autorisation de mise sur le marché européenne, mais analysé par la Haute Autorité de santé, a comparé le nirsévimab à l’absence d’intervention chez des nourrissons bien portants nés à un âge gestationnel ≥ 29 semaines.

Les infections à virus respiratoire syncytial (VRS) touchent l’ensemble de la population et tous les enfants y sont exposés avant l’âge de 2 ans. Si la maladie est majoritairement bénigne chez le nourrisson et l’enfant, elle représente, en phase épidémique, la première cause d’hospitalisation et de passage aux urgences en pédiatrie.

Il n’existe pas de thérapie curative de l’infection à VRS dont le traitement n’est que symptomatique. Les mesures d’hygiène simples et de bon sens [1] sont conseillées pour diminuer le risque de transmission et donc d’infection des nourrissons, quel que soit le virus respiratoire.

Un anticorps monoclonal, le palivizumab (SYNAGIS, une administration mensuelle en intramusculaire [IM] pendant toute la durée de la saison épidémique), est disponible depuis plus de vingt ans, en prévention des bronchiolites à VRS chez les enfants les plus vulnérables : nourrissons d’âge gestationnel (AG) < 35 semaines et de moins de 6 mois au début de l’épidémie saisonnière à VRS ; âgés de moins de 2 ans ayant nécessité un traitement pour dysplasie bronchopulmonaire au cours des 6 derniers mois ou atteints d’une cardiopathie congénitale avec retentissement hémodynamique.

Un nouvel anticorps monoclonal (humain de type immunoglobuline G1 kappa, produit dans des cellules d’ovaires de hamster chinois par la technologie de l’ADN recombinant), le nirsévimab (BEYFORTUS), dispose, depuis quelques mois, d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour la prévention des infections des voies respiratoires inférieures (IVRI) dues au virus respiratoire syncytial (VRS) chez les nouveau-nés et les nourrissons au cours de leur première saison de circulation du VRS (cf. notre article du 5 septembre 2023).

En cela réside son intérêt puisque, le seul médicament ayant jusqu’à maintenant une indication de prévention de la bronchiolite à RSV, le palivizumab (SYNAGIS), est réservé à une population très restreinte de certains prématurés. De plus, l’utilisation du nirsévimab est beaucoup plus simple que celle du palivizumab : 1 seule injection intramusculaire (IM) avant le début de la saison d'épidémie à VRS, ou dès la naissance chez les nourrissons nés au cours de la saison épidémique.

La prévention saisonnière, possible en médecine ambulatoire avec BEYFORTUS et chez tous les jeunes nourrissons, permet ainsi d’envisager un impact important sur les parcours de soins.

Globalement, pour montrer l’intérêt du nirsévimab il est mis en avant qu’il réduit de « plus de 75 % les infections respiratoires basses à VRS » avec une « sécurité très satisfaisante ». Ce résultat, qui émane des données poolées de plusieurs essais du dossier d’AMM, ayant comparé le nirsévimab à un placebo, est très prometteur, mais mérite d’être éclairci, car il ne s’agit que de la diminution d’un risque relatif versus placebo, qui n’a de sens qu’accompagné de la valeur absolue du critère touché par cette réduction.

Mais pour appréhender réellement l’importance du nirsévimab, il convient d’analyser les résultats des principaux essais ayant conduit à la mise à disposition de ce médicament.

Deux études d’efficacité de même schéma expérimental ont été publiées, qui ont comparé le nirsévimab à un placebo, mais dans des populations cibles différentes :

  • l’un (MELODY) a concerné des nourrissons nés à terme ou prématurés d’âge gestationnel (AG) ≥ 35 semaines ;
  • l’autre des grands prématurés (AG entre ≥ 29 semaines et < 35 semaines) ;

De plus, un essai de pharmacocinétique et de tolérance (MEDLEY), également publié, a comparé le nirsévimab et le palivizumab chez des nourrissons prématurés ou ayant une cardiopathie congénitale ou une pneumopathie chronique, mais sans résultats d’efficacité.

Enfin, un essai (HARMONIE) non examiné dans le cadre de l’AMM européenne, mais analysé par la Haute Autorité de santé (HAS), a comparé le nirsévimab et l’absence d’intervention chez des nourrissons bien portants nés à un AG ≥ 29 semaines.  

Deux essais d’efficacité ayant comparé le nirsévimab à un placebo

L’efficacité et la tolérance du nirsévimab en prévention de la bronchiolite liée au VRS ont été recueillies dans 21 pays dans le cadre de 2 essais contre placebo.

Après randomisation 2:1, stratifiée sur l’âge (≤ 3 mois ; 3 à 6 mois ; > 6 mois) et sur l’hémisphère (nord ou sud), ont été comparés le nirsévimab (une dose IM de 50 mg pour les nourrissons pesant moins de 5 kg ou de 100 mg pour ceux ≥ 5 kg) et un placebo.

Le critère principal d’évaluation était la survenue, dans les 150 jours suivant l’injection, d’une infection respiratoire à VRS (atteinte respiratoire basse et détection du virus) nécessitant une prise en charge médicale. Le nombre d’hospitalisations pour bronchiolite n’était qu’un critère secondaire.

Le nombre de patients à inclure (1 500) a été calculé selon les hypothèses suivantes : réduction du risque relatif de 70 %, risque alpha de 0,05, incidence attendue dans le groupe placebo d’infection des voies respiratoires inférieures (IVRI) liées au RSV de 8 %.

Les enfants inclus, âgés de moins de 1 an au début de leur première saison d’infection à VRS étaient :

  • dans un des essais, en bonne santé, nés à terme ou avec un AG ≥ 35 semaines ;
  • dans l’autre essai, en bonne santé, mais nés prématurés (AG entre 29 semaines et 34 semaines et 6 jours).

Chez des nourrissons nés à terme ou avec un AG ≥ 35 semaines

Dans cette étude (MELODY) [2], 1 490 nourrissons ont été tirés au sort au début de la saison de circulation du VRS : 1 027 dans l’hémisphère nord entre juillet et novembre 2019 ; 462 dans l’hémisphère sud entre janvier et mars 2020.

Ces enfants étaient comparables pour l’âge à l’inclusion (médiane : 2,6 mois), l’âge gestationnel (nés à terme : 86 %), le sexe, le poids, l’origine ethnique et l’hémisphère de résidence, dans les groupes nirsévimab (n= 987) et placebo (n=491).

Une bronchiolite confirmée à VRS est survenue, dans les 150 jours après l’injection, chez 12 enfants (1,2 %) du groupe nirsévimab et 25 (5 %) du groupe placebo, soit une réduction du risque relatif (RRR) de 74,5 % (IC95% [49,6%-87,1%]).

Les sujets d'Afrique du Sud n'ayant contribué à aucun événement en raison d'une faible incidence du VRS pendant la pandémie de Covid-19, les chiffres de l’hémisphère nord sont plus pertinents.

Dans l’hémisphère nord, une infection respiratoire à VRS survenue dans les 150 jours après l’injection, confirmée par examen virologique dans le laboratoire central (critère principal d’évaluation), a été rapportée chez 15 enfants (2, 2 %) avec le nirsévimab et 33 (9,6 %) ayant reçu un placebo, soit une RRR de 77,2 % (58,7-87,5), un nombre de cas évités de 74,7 (53 à 95) et un nombre d’enfants à traiter pour éviter un cas d’infection respiratoire à VRS calculé à 14 (11 à 19).

En revanche, la supériorité du nirsévimab par rapport au placebo n’a pas été démontrée sur le plan statistique en termes de réduction de l’incidence des hospitalisations liées à une infection des voies respiratoires inférieures (IVRI) à VRS confirmée par RT-PCR dans les 150 jours suivant l’administration : il y a eu 7 enfants (1 %) du groupe nirsévimab et 9 (2,6 %) du groupe placebo, soit une RRR d’hospitalisation de 61,1 (IC95% [−3,7-85]).

Par ailleurs, des anticorps antimédicament ont été décelés dans 6,1 % des cas avec le nirsévimab et 1,1 % des cas avec le placebo.

La tolérance a été similaire dans les deux groupes, essentiellement marquée par de très rares effets bénins à type de fièvre, inconfort, douleur au site d’injection. Des effets indésirables (EI) sérieux ont été rapportés, respectivement, chez 6,8 % et 7,3 % des enfants des groupes nirsévimab et placebo. Les 3 décès signalés ont concerné des patients ayant reçu le nirsévimab : l’un est inexpliqué, survenu à J140, les deux autres, à J143 et J338, ont été attribués à une gastroentérite.

Un nourrisson a présenté, 6 jours après l’injection de nirsévimab, une éruption maculaire généralisée, qui s’est résolue sans traitement au bout de 20 jours.

Chez des nourrissons nés prématurés

Parmi des nourrissons nés prématurés (âge gestationnel entre 29 semaines et 34 semaines et 6 jours), âgés de moins de 1 an, dans leur première saison d’infection à VRS, 1 453 ont été randomisés (969 dans le groupe nirsévimab et 484 dans le groupe placebo) et 1 447 ont reçu l’injection [3].

Ces enfants étaient comparables pour l’âge à l’inclusion (3,29 ± 2, 22 mois versus 3,28 ± 2,31 mois) respectivement avec le nirsévimab et le placebo), l’âge gestationnel (32,7±1,4 versus 32,7±1,5 semaines), le sexe, le poids et l’origine ethnique.

Dans les 150 jours suivant l’administration, une infection respiratoire à VRS, confirmée par examen virologique (critère principal d’évaluation), est survenue chez 25 enfants (2,6 %) du groupe nirsévimab et 46 (9,5 %) de ceux ayant reçu le placebo, soit une RRR de 70,1 % (IC95%[52,3%-8,2%]).

Une hospitalisation pour bronchiolite due au VRS a été nécessaire chez 1 % (n=7) des enfants du groupe nirsévimab et 2,6 % (n=9) du groupe placebo, soit une réduction du risque relatif d’hospitalisation de 78,4 % (51,9 % à 90,3 %).

La tolérance a été similaire, essentiellement marquée par de très rares événements bénins. Des effets indésirables (EI) sérieux se sont manifestés dans, respectivement, 8 % des cas et 12,5 % avec le nirsévimab et le placebo. Les 5 décès déclarés (2 avec le nirsévimab et 3 avec le placebo) n’ont pas été considérés comme liés aux traitements comparés.

Un essai de pharmacocinétique et de tolérance

L'essai MEDLEY [4] a comparé le nirsévimab et le palivizumab. Il a inclus :

  • d’une part des prématurés éligibles au palivizumab, nés à ≤ 35 semaines de grossesse, sans cardiopathie congénitale (CHD) ni maladie pulmonaire chronique (CLD), constituant la cohorte « prématurés » ;
  • d’autre part, des enfants nés à terme et atteints d’une cardiopathie congénitale (CHD) ou d’une maladie pulmonaire chronique (CLD) : la cohorte « CHD/CLD ».

Ont été comparés, après randomisation et en double aveugle : le nirsévimab (dose unique de 50 mg si poids < 5 kg ou de 100 mg si poids ≥ 5 kg, suivie, pour maintenir le double aveugle, d’une dose mensuelle de placebo pendant 4 mois) et le palivizumab (15 mg/kg en IM à raison d’une dose mensuelle pendant 5 mois).

La surveillance des EI a été réalisée jusqu’à J361.

Au total, 925 nourrissons ayant une CHD ou une CLD ont été inclus entre juillet 2019 et mai 2021 : 310 dans la cohorte des enfants nés à terme et 615 dans celle des prématurés. Le suivi était disponible pour 886 enfants (95,8 %) à J150 et pour 365 (39,5 %) à J361. Les caractéristiques des nourrissons étaient comparables dans les deux cohortes entre les groupes palivizumab et nirsévimab.

L’incidence des effets indésirables a été similaire dans les deux groupes : au moins un EI a été rapporté chez 65 % versus 66 % des enfants avec, respectivement, le palivizumab et le nirsévimab dans la cohorte des prématurés et chez 73,5 % versus 71,2 % dans la cohorte CHD-CLD.

Deux EI d’intérêt particulier sont survenus dans le groupe nirsévimab : une thrombopénie à l’héparine chez un nourrisson porteur d'une cardiopathie congénitale et un rash maculo-papuleux à la suite d’une injection de placebo chez un prématuré.

Cinq enfants dans le groupe nirsévimab (2 dans la cohorte des prématurés et 3 dans la cohorte CHD-CLD) et 1 dans le groupe palivizumab sont décédés, mais ces morts n’ont pas été attribués par l’investigateur aux médicaments comparés. Sept ont eu une bronchiolite à VRS : 4 (0,6 %) ayant reçu le nirsévimab  et 3 (1 %) le palivizumab.

Les concentrations sériques de nirsévimab à J151 étaient similaires, dans les ces 2 cohortes, à celles mesurées dans l’essai MELODY. Des anticorps antimédicament ont été détectés à J151 chez 0,4 % des enfants du groupe nirsévimab et 3,6 % de ceux du groupe palivizumab.

Les données regroupées de l’ensemble de ces études

Les données de ces différents essais ont été regroupées et publiées dans le Lancet Child Adolesc Health [5].

L’efficacité attendue chez les nourrissons à haut risque d’infection grave par le VRS (maladie pulmonaire chronique, cardiopathie congénitale ou ancien très grand prématuré d’âge gestationnel <29 semaines) a été extrapolée à partir de celle du nirsévimab rapportée dans les essais contre placebo sus-cités, et sur la base des données pharmacocinétiques de l’essai de sécurité MEDLEY.

Chez 2 350 nourrissons (1 564 dans le bras nirsévimab et 786 dans le bras placebo) inclus dans l’analyse groupée, le nirsévimab a réduit, par rapport au placebo, les IVRI liée au VRS (1 % versus 6 %), soit une RRR de 79,5 % (IC95% [65,9-87,7]). Il en a été de même pour les hospitalisations liées aux IVRI à VRS (1 % versus 3 %), soit une RRR de 77,3 % (50,3-89,7) et les formes très sévères (< 1 % versus 2 %), correspondant à une RRR de 86 % (62,5-94,8).

Les enfants du groupe nirsévimab ont également nécessité moins d’hospitalisations pour une maladie respiratoire toutes causes confondues (RRR de 43,8 % [18,8-61,1]), de visites ambulatoires pour IVRI (41,9% [25,7-54,6]) et de prescriptions d’antibiotiques (23,6 % [3,8-39,3]).

Chez les nourrissons à haut risque d’infection grave à VRS (maladie pulmonaire chronique, cardiopathie congénitale ou ancien très grand prématuré d’âge gestationnel < 29 semaines) dans les 150 jours suivant l’administration, l’incidence des IVRI à VRS confirmées par RT-PCR a été faible et comparable dans les deux bras nirsévimab et palivizumab (0,6 % [4/616] versus 1 % [3/309]), de même que l’incidence des hospitalisations liées à une IVRI dues au VRS (0,3 % [2/616] versus 0,6 % [2/309]).

L’étude HARMONIE seulement analysée par la HAS

HARMONIE est un essai qui n’a pas été examiné dans le cadre de l’AMM européenne, mais qui a été analysé par la HAS. Stratifiée sur le pays de résidence (France, Allemagne, Royaume-Uni) et l’âge (≤ 3 mois, > 3 mois à ≤ 6 mois, > 6 mois), randomisée, en ouvert, multicentrique, cette étude a comparé le nirsévimab (dose 50 mg si poids < 5 kg et de 100 mg si poids ≥ 5 kg) à l’absence d’intervention, chez des nourrissons nés à un AG ≥ 29 semaines, non éligibles au palivizumab. Le critère de jugement principal était l’incidence des hospitalisations liées à une IVRI à VRS confirmée par RT-PCR.

Selon une analyse intermédiaire réalisée en avril 2023, sur les 8 058 sujets inclus (4 037 dans le groupe nirsévimab et 4 021 dans le groupe sans intervention), l’incidence des hospitalisations liées à une IVRI à VRS a été significativement plus faible dans le groupe nirsévimab par rapport au groupe sans intervention (0,3 % versus 1,5 %), soit une RRR de 83,2 % (IC95% [67,8-92,0]). Chez les patients inclus en France, cette incidence a été de 0,3 % versus 2,3 %, soit une RRR de 89,6 % (58,7-98,7).

Les effets indésirables graves ont été plus fréquents dans le groupe nirsévimab : au site d’injection (érythème, gonflement, urticaire), fièvre, infections des voies respiratoires supérieures. Aucun décès n’a été rapporté. Trois EI d'intérêt particulier avec le nirsévimab (réaction d’immunisation, éruption maculo-papuleuse, dermatite allergique) et un (allergie alimentaire) dans le groupe sans intervention ont été rapportés.

L’avis de la Haute Autorité de santé

Au vu de l’ensemble des données, la HAS s’est prononcée [6] sur le nirsévimab dans la prévention des IVRI dues au VRS selon les différentes situations, c’est-à-dire selon que le palivizumab était ou non indiqué, et en axant son évaluation sur la capacité du nirsévimab à réduire les formes de bronchiolite liées au VRS nécessitant une hospitalisation.

La HAS considère ainsi que :

Chez les nouveau-nés et les nourrissons à risque élevé d’infection à VRS, éligibles au palivizumab

Le nirsévimab :

  • a un rapport efficacité/effets indésirables mal établi, dans la mesure où, les données d’efficacité suggèrent un intérêt dans la prévention des bronchiolites graves nécessitant une hospitalisation, sans pouvoir évaluer son bénéfice par rapport au palivizumab ;
  • a, au même titre que le palivizumab, un service médical rendu (SMR) faible, ce qui induit un taux de remboursement proposé de 15 % ;
  • n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) par rapport au palivizumab, compte tenu :
    • de l’absence de supériorité ou de non-infériorité démontrées de l’efficacité du nirsévimab par rapport au palivizumab,
    • d’un profil de tolérance comparable, malgré une incidence plus élevée avec le nirsévimab d’événements indésirables graves pulmonaires, de décès, et d’hypersensibilité,
    • d’une simplicité d’utilisation du nirsévimab,
    • de la crainte de sélection de variants résistants

Chez les nouveau-nés et les nourrissons avec ou sans facteurs de risque, non éligibles au palivizumab

Le nirsévimab :

  • a un rapport efficacité/effets indésirables moyen : population à faible risque ; réduction dans les 150 jours suivant l’administration de l’incidence des IVRI à VRS et des hospitalisations liées à ces infections, mais pas de la mortalité ;
  • a un service médical rendu modéré, ce qui conduit à un taux de remboursement proposé de 30 % ;
  • apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV), compte tenu :
    • d’une baisse de l’incidence des IVRI à VRS confirmés par RT-PCR, dans les 150 jours suivant l’administration, statistiquement significative contre placebo : 2,6 % (25/969) versus 9,5 % (46/484), soit une diminution du risque relatif de 70 % (52,3 ; 81,2) dans une des études analysées ; et de 1,2 % (12/994) versus 5 % (25/496), soit une réduction du risque relatif de 74,5 % (49,6 ; 87,1), dans une autre étude,
    • d’un impact attendu sur la réduction des hospitalisations liées à une IVRI à VRS , mais avec des résultats hétérogènes selon les études : 0,8 % (8/969) versus 4,1 % (20/484) sous placebo, soit une RRR de 78,4 % (51,9-90,3) dans une des études analysées ; de 0,6 % (6/994) versus 1,6 % (8/496), soit une RRR de 62,1 % (-8,6-86,8), donc non significative, dans une autre étude ; une diminution des hospitalisations versus pas de traitement de 0,3 % (11/4 037) versus 1,5 % (60/4 021), soit une RRR de 83,2 % (67,8-92,0) dans une étude non publiée,
    • de l’absence de données permettant d’étayer un éventuel impact du nirsévimab en termes de réduction de la durée d’hospitalisation, de transfert en unité de soins intensifs ou en réanimation et de mortalité,
    • d’un profil de tolérance acceptable,
    • d’une simplicité d’utilisation du nirsévimab,
    • de la crainte de sélection de variants résistants.

L’avis de la direction générale de la Santé

La direction générale de la Santé (DGS), dès juillet 2023 [7], écrivait aux médecins, que, sous réserve d’un avis favorable de la HAS, le nirsévimab « pourrait permettre d’étendre la prévention des formes graves de la bronchiolite à VRS, via une seule injection, à l’ensemble des enfants vivant leur première saison de circulation du VRS ».

Dans un second message, adressé un mois plus tard [8] (DGS 24 août 2023), la DGS confirmait que le nirsévimab « était indiqué y compris chez tous les nourrissons sans facteur de risque de forme grave vivant leur première saison d’exposition au VRS, c’est-à-dire pour cette année ceux nés à partir du 6 février 2023 ».

Il pourra être prescrit à l’ensemble des nourrissons nés à partir du 6 février 2023 en métropole ; sera disponible à partir de mi-septembre dans les établissements de santé et sur commande dans les pharmacies d’officine. La DGS ajoute qu’« il est recommandé que les nourrissons nés à partir du 15 septembre 2023 (date de mise à disposition du médicament) soient immunisés avant leur sortie de maternité ».

Cette opinion très favorable s’appuie sur celle du Conseil national des professionnels de pédiatrie (CNPP) et de la Société française de néonatologie (SFN). Ces spécialistes ont, en effet, annoncé plus de 80 % de réduction des hospitalisations pour IVRI à VRS et 75 % de diminution des formes très sévères de bronchiolites. Ils préconisent l’injection IM de nirsévimab à tous les nourrissons âgés de moins de 1 an au cours de la période épidémique du VRS (habituellement entre mi-octobre et mi-février). Cette injection devra être pratiquée prioritairement en maternité ou, pour les nourrissons hospitalisés, avant leur retour à domicile, dès septembre 2023. Les enfants nés avant cette période seront immunisés en ambulatoire par leur pédiatre ou médecin traitant ou encore en PMI (protection maternelle infantile).

De plus, et malgré l’absence d’essai ayant comparé l’efficacité du nirsévimab avec celle du palivizumab chez les nourrissons actuellement éligibles au palivizumab, ces instances pédiatriques, considèrent que le nirsévimab doit être proposé en priorité aux enfants à risque élevé d’infection grave à VRS (grands prématurés nés à un terme < 29 semaines, atteints de dysplasie bronchopulmonaire ou d’une autre pathologie pulmonaire chronique, de cardiopathies congénitales), en raison de son profil de sécurité équivalent, et de la simplicité du schéma d’injection.

Conclusion

BEYFORTUS (nirsévimab) est un anticorps monoclonal qui peut être proposé en prévention des infections des voies respiratoires inférieures dues au VRS, à tous les nourrissons, éligibles ou non au palivizumab (SYNAGIS).

Néanmoins, il convient d’informer les professionnels de santé et les parents que la diminution de l’incidence des bronchiolites n’est pas leur suppression et que la réduction des formes graves nécessitant une hospitalisation n’est pas clairement établie.

Enfin, la surveillance de la tolérance de BEYFORTUS en post-AMM, c’est-à-dire en population large, est nécessaire, comme pour tout nouveau médicament, mais aussi en raison de certains effets indésirables d’intérêt particulier ayant eu tendance, dans les essais d’efficacité, à être plus nombreux avec le nirsévimab qu’avec le placebo.

 

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