La maladie lithiasique est le plus souvent découverte à l'occasion d'une colique néphrétique.Albina Gavrilovic / iStock/Getty Images Plus / via Getty Images
La maladie lithiasique est le plus souvent une pathologie de l’abondance, en lien avec une alimentation trop riche et des apports hydriques insuffisants.
Elle entraîne la formation de calculs urinaires, qui se manifestent fréquemment par une colique néphrétique.
Les recommandations de l’Association française d’urologie, rédigées de concert avec différentes sociétés savantes, ont récemment été actualisées.
Elles précisent les modalités de prise en charge de la colique néphrétique et du bilan étiologique, indispensable pour éliminer une pathologie rare et établir les règles de prévention secondaire, seul moyen de réduire le risque de récidive.
Les règles diététiques se fondent essentiellement sur deux paramètres, l’eau et le calcium, et sur deux facteurs à limiter, le sel et les protéines animales.
La lithiase urinaire concerne en France 10 % de la population. Elle touche aujourd’hui 2 hommes pour 1 femme et l’âge moyen de survenue du premier calcul est de 40 ans. Le sex-ratio, qui était auparavant de 3 hommes pour 1 femme, tend donc à se réduire, reflet de l’adoption progressive par les femmes d’un régime alimentaire proche de celui des hommes.
Car la lithiase est dans la majorité des cas (85 %) liée au mode d’alimentation et fortement à la consommation excessive de sel, de sucres et de protéines animales. Sa prévalence est de ce fait encore plus élevée dans certaines régions du monde, notamment aux États-Unis (de 13 à 15 %) ou au Moyen-Orient (de 18 à 20 %), où la chaleur vient s’ajouter aux effets délétères d’une alimentation riche et de la sédentarité.
Colique néphrétique : la douleur au premier plan
Si un calcul rénal peut être mis en évidence de façon fortuite lors d’une radiographie abdominale, parfois lors du bilan d’une hématurie chronique ou d’une pyélonéphrite, la découverte de la maladie lithiasique a lieu le plus souvent à l’occasion d’une colique néphrétique.
Ce syndrome douloureux aigu lombo-abdominal est responsable, chaque année en France, de 120 000 passages aux urgences (soit de 1 à 2 % du total), sans compter les plusieurs dizaines de milliers de cas pris en charge en ville. Son coût socio-économique est donc considérable.
La colique néphrétique, qui se traduit par une douleur lombaire unilatérale brutale et intense avec irradiation antérieure, est liée à la mise en tension brutale de la voie excrétrice supérieure en amont d’une obstruction. Elle est dans de 80 à 85 % des cas en lien avec un calcul.
La douleur doit être soulagée rapidement, en prescrivant, en première intention et en l’absence de contre-indications, un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS).
Un examen d’imagerie en urgence est indiqué dans certaines situations : rein unique, fièvre, insuffisance rénale aiguë ou en cas de doute diagnostique de colique néphrétique. Il ne doit pas retarder le traitement antalgique.
Certaines formes nécessitent une prise en charge en urgence en milieu hospitalier : pyélonéphrite lithiasique, colique néphrétique sur rein unique ou anurique, colique néphrétique hyperalgique résistant aux AINS et aux morphiniques... Chaque année, quelque 12 000 à 15 000 drainages sont réalisés au bloc opératoire dans ce contexte d’urgence (cf. Infra).
Traitement initial, l’essor de l’urétéroscopie
Les calculs urétéraux symptomatiques peuvent être évacués spontanément au décours de la crise de colique néphrétique, et ce, d’autant plus qu’ils sont de petit volume et bas situés.
Lorsqu’un traitement urologique est indiqué, plusieurs techniques sont disponibles : urétéroscopie, lithotritie extracorporelle et chirurgie percutanée. La chirurgie à ciel ouvert et la cœlioscopie n’ont plus que quelques rares indications.
L’urétéroscopie associée au laser, qui a bénéficié au fil du temps de nombreux progrès, en particulier grâce à la miniaturisation des endoscopes, a pris un véritable essor depuis 20 ans. Effectuée le plus souvent sous anesthésie générale, elle est ainsi devenue le traitement de référence (environ 80 000 gestes par an).
Parallèlement, le recours à la lithotritie extracorporelle (LEC), technique développée au début des années 1980 et réalisée en ambulatoire sous sédation-analgésie a beaucoup diminué, et désormais, 20 000 patients environ bénéficient de cette technique chaque année.
Le choix de l’une ou l’autre approche se fonde en grande partie sur le volume - paramètre préféré à la taille - du calcul et sur sa densité, mesurés au scanner. Généralement, les calculs de petit volume et de faible densité sont une bonne indication de la LEC, avec un taux de succès de l’ordre de 70 %.
La néphrolithotomie percutanée s’adresse aux calculs complexes, de gros volume, avec des ramifications, anciennement appelés coralliformes. Cette intervention (environ 1 000 par an) n'est pratiquée que dans quelques centres experts.
L’enquête étiologique, indispensable pour guider la prise en charge
Le diagnostic étiologique est un temps essentiel du bilan puisqu’il guide la prise en charge, indispensable pour réduire le risque de récidive, qui est, en son absence, de 70 % à 10-15 ans.
L’analyse morphoconstitutionnelle du calcul par spectrophotométrie infrarouge, lorsque le calcul a pu être récupéré après filtrage des urines ou un geste urologique, est un temps essentiel de ce bilan étiologique.
L’interrogatoire à la recherche des antécédents, de la prise de médicaments tels que diurétiques, calcium, vitamine D, est complété par une enquête diététique quantitative et qualitative, qui permet, en particulier, de préciser les apports hydriques, en produits laitiers, en protéines animales, en sel et en sucre.
Un bilan métabolique simple est indiqué chez tous les patients, dès la première crise, 6 semaines après l’épisode aigu, sans modification des habitudes alimentaires :
- sang : créatinine (fonction rénale), glycémie (diabète ou syndrome métabolique), uricémie (syndrome métabolique) et calcémie (hyperparathyroïdie) ;
- urines : volume des 24 heures (facteur de risque si inférieur à 2 litres), calcium, sodium, acide urique, urée (qui traduit la consommation protidique dans les 24 heures précédentes).
Un scanner sans injection est l’examen d’imagerie de choix à distance de l’épisode aigu.
Les calculs ont le plus souvent une composition mixte. Plus de la moitié (de 50 à 55 %) sont oxalo-calciques riches en oxalates et de 20 à 25 % sont oxalo-calciques riches en calcium. Dans de 12 à 15 % des cas, il s’agit de calculs d’acide urique, dans de 10 à 15 % des cas de calculs phospho-calciques et dans de 1 à 2 % des cas de calculs liés à une origine génétique (cystine...).
Avant tout, des règles hygiéno-diététiques
Sauf étiologie curable par un traitement spécifique, la prévention de la récidive se fonde sur des mesures hygiéno-diététiques (cf. Fiche « Règles diététiques et calculs urinaires » de l'Association française d'urologie) :
- boire suffisamment pour obtenir une diurèse de plus de 2 litres par jour, seuil à partir duquel les urines ne cristallisent quasiment pas.
Que boire ? De l’eau surtout, plutôt plate que gazeuse, du robinet, de source (peu riche en minéraux) ou parfois minérale (type en fonction du profil métabolique du patient et du calcul).
Le jus d’orange, qui alcalinise les urines (riche en citrate) est recommandé à raison d’un verre par jour, pas plus, car il est sucré et donc source d’acide urique.
Il n’y a pas de restriction particulière concernant le thé et le café (attention cependant chez les très grands buveurs de thé).
L’alcool doit être limité, notamment la bière, source d’acide urique.
- avoir une activité physique ;
- varier l’alimentation et réduire l’apport en protéines d’origine animale (cela concerne tous les types de protéines animales, pas seulement la viande rouge), en sel, en sucre et éviter les excès caloriques.
Les légumes peuvent être consommés à volonté, à quelques exceptions près (brocolis, épinards, groseilles…).
Éviter la prise en grande quantité d'aliments riches en oxalates comme le chocolat noir et les produits à base de cacao, les fruits secs, le poivre, la vitamine C...
- normaliser les apports en calcium (et non pas les supprimer, au risque de favoriser une oxalurie), ce qui, chez certains patients, passe par leur augmentation. La cible est un apport de 1 g par jour, via les produits laitiers (3 par jour) ou une eau riche en calcium pour les personnes ne prenant pas de produits laitiers.
La surveillance est habituellement annuelle, l’examen clinique étant complété par une échographie et une radiographie d’abdomen sans préparation ou un scanner sans injection, selon un protocole à faible dose.
D’après un entretien avec le Pr Olivier Traxer, chef du service d’urologie, hôpital Tenon, Paris.
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