Mise à jour : 12 juillet 2016
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La popularité grandissante des compléments alimentaires a considérablement élargi l’offre disponible aujourd’hui en pharmacies, en parapharmacies, dans les magasins d’alimentation naturelle et dans les grandes surfaces. De nombreux produits sont parés d’effets parfois quasi miraculeux. Mais en réalité qu’en est-il ? Leurs ingrédients ont-ils fait la preuve de leur efficacité ?

Dans l’ensemble, il est raisonnable de dire que la plupart des ingrédients contenus dans les compléments alimentaires n’ont pas fait l’objet d’études d’efficacité convaincantes. Il existe néanmoins des exceptions notables comme les études concernant l’action des antioxydants (bêta-carotène, vitamine E, zinc, etc.) dans le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou celle des folates dans la prévention des anomalies du développement du système nerveux de l’embryon pendant la grossesse.

Mais, pour de nombreuses substances utilisées, les industriels ne disposent pas d’études dignes de confiance et vantent leurs produits en utilisant divers arguments discutables.

Les faux arguments historiques des compléments alimentaires

compléments alimentaires

De nombreux compléments alimentaires contiennent des ingrédients, et en particulier des plantes, qui sont utilisés depuis longtemps dans le cadre de la phytothérapie traditionnelle. Un usage ancestral d’une plante ne signifie pas qu’elle soit efficace. Cela arrive toutefois et de nombreux médicaments efficaces ont d’abord été extraits de plantes. Mais avant de pouvoir conclure sur leur efficacité, il est nécessaire d’identifier chimiquement les substances responsables de l’effet revendiqué et d’évaluer leurs effets et leur toxicité dans le cadre d’essais cliniques contrôlés (voir ci-dessous).

Les faux arguments épidémiologiques des compléments alimentaires

Un des arguments employés pour justifier les propriétés supposées d’un complément alimentaire consiste à dire, par exemple, que « les populations qui vivent dans le pays d’origine de cette substance présentent un très faible taux de telle ou telle maladie ».

Ce type d'affirmation épidémiologique (à l'échelle d'une population), s'il est juste sur un plan factuel, doit être confirmé par d'autres études plus précises afin de mieux en comprendre le sens. De très nombreuses autres causes peuvent être envisagées et il ne s'agit pas forcément d'une relation de cause à effet. Par exemple, les Esquimaux vivent au pays des phoques et présentent un faible taux de maladies cardiovasculaires. Cela est peut-être dû à la consommation de viande de phoque... mais plus probablement à celle de poisson.

Plus subtile, l’affirmation qui consiste à dire par exemple que « la vitamine C prévient les maladies cardiovasculaires puisque les personnes qui consomment beaucoup d’aliments riches en vitamine C en souffrent moins que celles qui en consomment peu ». Manger de grandes quantités d'aliments riches en vitamine C signifie manger beaucoup de fruits et de légumes et ceux-ci apportent de nombreux autres nutriments, comme, par exemple, les fibres et les flavonoïdes, qui pourraient tout aussi bien expliquer ce phénomène. Plus indirectement, il se pourrait que les personnes qui mangent beaucoup de fruits et de légumes aient globalement une vie plus saine que les autres, par exemple qu'elles soient plus sportives. La consommation de vitamine C constitue alors un marqueur indirect d'un style de vie plus sain à l'origine de l'effet protecteur observé avec les maladies cardiovasculaires.

Dans tous les cas de figure, il faut être prudent dans l'interprétation de ces données épidémiologiques qui permettent certes d'étayer la connaissance des relations entre l'alimentation et la santé, mais qui ne peuvent pas établir un lien de cause à effet.

Les études faites en laboratoire au secours des compléments alimentaires

Parfois, il arrive que les informations disponibles sur un complément alimentaire mentionnent des études faites en laboratoire, sur des cellules en culture ou sur des animaux, qui sont le plus souvent le rat ou la souris. Bien menées, ces études peuvent apporter des informations intéressantes justifiant de mener des essais chez l’homme. Mais un résultat positif chez le rat ne prouve pas l’efficacité chez l’homme. De plus, une substance dépourvue de toxicité chez l’animal peut se révéler toxique pour l’homme comme cela est régulièrement observé lors de la mise au point de médicaments.

Les études cliniques de qualité insuffisante pour les compléments alimentaires

Les fabricants de compléments alimentaires mentionnent parfois les résultats d’études cliniques effectuées chez l’homme. Ce type d’étude est le seul moyen de prouver de manière certaine l’efficacité d’une substance dans un contexte particulier. Malheureusement, pour être fiable, une étude clinique doit remplir certains critères et cela est rarement le cas pour celles qui ont évalué les compléments alimentaires.

Pour être considérée de qualité, une étude clinique doit :

  • être randomisée, c’est-à-dire ayant recours, par tirage au sort, à deux groupes de patients ayant des caractéristiques similaires au début de l’étude ; ce procédé permet d’aboutir à la constitution de deux groupes de patients ayant des caractéristiques similaires au début de l’étude ;
  • être contrôlée, c’est-à-dire comparer un groupe ayant reçu la substance étudiée à un groupe ayant pris un placebo qui est une substance sans activité thérapeutique (on parle alors d’étude contre placebo) ;
  • s’appuyer sur des groupes de taille suffisamment importante pour que les différences observées entre les deux groupes ne soient pas dues au hasard.

Ce type d’étude clinique coûte très cher et la plupart des fabricants de compléments alimentaires n’ont pas les moyens d’investir dans de tels essais, d’autant plus que la plupart de leurs ingrédients ne sont pas brevetables. De fait, la très vaste majorité des études cliniques revendiquées pour les compléments alimentaires sont souvent de trop petite taille, sans placebo ou effectuées sans garantie d’homogénéité préalable entre les groupes comparés.

Dans la mise au point d'un médicament comme dans l'évaluation des compléments alimentaires, il arrive fréquemment que des études préliminaires prometteuses soient contredites par une étude de grande taille respectant les règles de la recherche clinique.

Les avis des autorités de santé européennes sur les allégations de santé

Les autorités de santé européennes (EFSA, European Food Safety Authority et la Commission européenne) se prononcent régulièrement sur certaines allégations santé des aliments et des compléments alimentaires, après examen de données scientifiques. Pour chaque ingrédient, elles indiquent notamment :

  • les allégations de santé autorisées et leurs conditions d'utilisation, avec parfois certaines restrictions ;
  • les allégations de santé non autorisées et les motifs du refus.
Vous pouvez retrouver les différents avis émis sur le site de la Commission Européenne (en anglais).

 

La fortification ou enrichissement alimentaire, qu'est-ce que c'est ?
Parfois, il arrive que les autorités de santé décident d'enrichir un ou plusieurs aliments avec un nutriment particulier, en général pour prévenir une maladie ou un problème de santé publique. C'est le cas, par exemple, de l'enrichissement du sel en fluor ou de l'enrichissement des farines en vitamine B9 dans certains pays comme les États-Unis ou le Canada et dans certains pays d'Europe. Ce type de décision est complexe et demande de longues études portant sur de vastes populations.
Les objectifs de l'enrichissement alimentaire visent à prévenir les effets négatifs d'apports insuffisants. Ils sont très différents de ceux de la prise de compléments alimentaires qui vise à prendre certains nutriments en quantité supérieure à celle recommandée dans le cadre d'une alimentation équilibrée.
Les bénéfices de l'enrichissement de l'alimentation en une substance particulière ne justifient pas forcément son usage dans le contexte d'un complément alimentaire, dont la preuve de l'efficacité doit être faite. Par exemple, l'enrichissement du sel de cuisine en iode contribue à la prévention de problèmes thyroïdiens, mais l'administration de compléments alimentaires contenant de grandes quantités d'iode peut se révéler toxique.
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