Le tremblement de repos (disparaissant lors du mouvement) n’est pas obligatoire pour le diagnostic.Daisy-Daisy / iStock/Getty Images Plus / via Getty Images
Le diagnostic de maladie de Parkinson (MP) repose sur la triade de signes moteurs souvent asymétriques : bradykinésie, tremblement de repos et rigidité plastique, et sur l’absence d’autres signes neurologiques (« drapeaux rouges »).
Les symptômes non moteurs doivent aussi être pris en compte : troubles de l’odorat, de comportement en sommeil paradoxal, cognitifs et dysautonomiques. Ils peuvent être révélateurs, impacter fortement la qualité de vie, et sont importants à la fois pour le diagnostic et le pronostic.
En cas de présentation typique, aucun examen complémentaire n’est requis. Un avis neurologique est toutefois recommandé pour confirmer le diagnostic avant de débuter le traitement.
Une consultation d’annonce par le neurologue est nécessaire pour préciser l’impact de la maladie, le bénéfice du traitement, la prise en charge non médicamenteuse et multidisciplinaire. Le médecin généraliste participe à l’annonce et il assure le suivi ainsi que la coordination du parcours de soins.
Ce chapitre complète l’actualité VIDAL « Pour mieux comprendre la maladie de Parkinson » et est suivi d'un article sur la prise en charge thérapeutique.
Le diagnostic de maladie de Parkinson (MP) est un diagnostic essentiellement clinique et il a longtemps reposé sur la fameuse triade de signes moteurs de Sir James Parkinson : tremblement de repos, akinésie, rigidité. Cependant, comme l’ont rapporté rapidement de nombreux auteurs, les critères diagnostiques classiques peuvent être pris en défaut même entre les mains d'experts des mouvements anormaux. En 2002, le travail de Hugues AJ et al., réalisé entre 1990 et 1999, qui a permis d’étudier en post-mortem 143 cerveaux de patients ayant un diagnostic de MP (n = 73), ou d’un autre syndrome parkinsonien (n = 70), a montré que la valeur prédictive positive de la clinique n’était que de 85 %. Il ressort également de cette étude neuropathologique que les erreurs diagnostiques sont plus fréquentes en début de maladie et qu’elles sont souvent en rapport avec des difficultés à distinguer la MP des autres syndromes parkinsoniens dégénératifs ou d’un tremblement essentiel.
À noter que ces auteurs avaient réalisé une étude analogue dix ans auparavant sur une centaine de cerveaux de patients d’un âge moyen de 75 ans et ayant une MP évoluant depuis treize ans en moyenne. Ils avaient alors rapporté de nombreuses comorbidités cérébrales et notamment la présence concomitante :
- de lésions évoquant une maladie d’Alzheimer (n = 17) ;
- de corps de Lewy corticaux (n = 10) ;
- et d’anomalies vasculaires (n = 34).
Ces données confirment la complexité de la MP et l’imprécision des critères cliniques classiques justifiant de nouvelles propositions.
Vers de nouveaux critères diagnostiques
À partir des années 1980, plusieurs équipes ont ainsi fait évoluer les critères diagnostiques afin de prendre en compte les avancées des connaissances concernant les symptômes non moteurs, l’imagerie, les syndromes parkinsoniens et le concept de « Parkinson prodromal » (diagnostic avant l’apparition des symptômes moteurs). En effet, comme précisé dans notre premier article « Pour mieux comprendre la maladie de Parkinson », cette dernière débute souvent par des symptômes non moteurs (troubles du sommeil et/ou de l’odorat).
En 2015, la Movement Disorders Society a proposé des critères diagnostiques qui sont complexes pour les non-spécialistes distinguant des « signes en faveur », des « critères d’exclusion » et « l’absence de drapeaux rouges » (normalité du reste de l’examen neurologique). Soulignons qu’en présence de tels drapeaux, c’est le diagnostic de syndrome parkinsonien qui doit être évoqué (cf. Tableau).
Pour le médecin généraliste, et de manière pragmatique, on peut reprendre la description clinique classique de la triade motrice parfois incomplète (bradykinésie, tremblement de repos, rigidité) en tenant compte des symptômes non moteurs (troubles de l’odorat, manifestations nocturnes en sommeil paradoxal, troubles cognitifs et dysautonomie), qui ont une importance à la fois sur les plans diagnostique et pronostique.
La bradykinésie au cœur de la symptomatologie
Le diagnostic de MP doit être évoqué devant une gêne fonctionnelle ou des anomalies à l’examen clinique en rapport avec une bradykinésie. Cette gêne se définit par des difficultés à :
- initier (akinésie) le mouvement ;
- maintenir l’amplitude (hypokinésie), la vitesse (lenteur ou bradykinésie) et le rythme d’un mouvement répétitif.
Le clinicien se doit d’observer ces différentes caractéristiques du mouvement lors de la réalisation :
- de gestes répétitifs comme l’ouverture/fermeture du poing ou de la pince pouce-index ;
- de l’épreuve des marionnettes, ou de la frappe du sol avec la plante du pied, ou encore, du battement de la mesure.
Cette bradykinésie, cœur de la symptomatologie parkinsonienne, se manifeste dans la vie quotidienne par :
- une lenteur globale ;
- une perte du ballant du bras ;
- une micrographie ;
- une amimie (faciès figé) ;
- une hypophonie.
Ces anomalies peuvent être suffisamment caractéristiques pour que le diagnostic soit évoqué dans certains cas dès la salle d’attente.
Un tremblement de repos inconstant et une rigidité plastique
L’autre circonstance évocatrice est la découverte d’un tremblement de repos de la main :
- souvent asymétrique ;
- plus ou moins important ;
- et inconstant (notamment au début de la maladie).
La description faite par les premiers auteurs d’un patient qui « roule de la mie de pain » reste d’actualité.
L’examen clinique complète le tableau classique en mettant en évidence lors de la mobilisation des segments de membre une rigidité, dite plastique, à type de roue dentée (cédant par à-coups).
Des troubles de l’odorat insidieux
Les symptômes non moteurs sont parfois précoces et peuvent précéder le diagnostic de plusieurs années. En particulier, les troubles de l’odorat sont insidieux, banalisés ou attribués à une cause ORL. On les recherche en interrogeant le patient sur ses capacités à sentir les parfums, le brûlé, le café, la banane…
De manifestations nocturnes évocatrices
L’autre symptôme très évocateur de la MP est nommé trouble du comportement en sommeil paradoxal. Au cours du sommeil, l’activité électrique est globalement ralentie, mais elle augmente, lors des rêves, pour atteindre un niveau proche de celui de l’éveil. Dans le même temps, il existe une atonie musculaire physiologique. Or, en cas de MP, la structure cérébrale responsable de cette atonie est affectée par le processus morbide libérant ainsi la motricité qui reproduit le scénario du rêve. Les patients ayant un trouble du comportement en sommeil paradoxal peuvent ainsi présenter, avant la survenue des symptômes moteurs, des manifestations nocturnes avec discours, cris et gestes orientés, perturbant grandement le sommeil du conjoint et les amenant à consulter.
Troubles cognitifs et dysautonomie à ne pas négliger
Les autres symptômes non moteurs non iatrogènes sont nombreux et plus tardifs.
Sur le plan psychique, sont rapportés des affects dépressifs, des manifestations anxieuses ou une vulnérabilité émotionnelle.
Un tiers des patients peuvent avoir, dès le début du diagnostic, des troubles attentionnels.
Les troubles mnésiques peuvent évoluer à une vitesse variable vers des troubles cognitifs sévères sous corticaux.
Les manifestions dysautonomiques sont possiblement trompeuses :
- constipation ;
- troubles mictionnels ;
- impuissance ;
- ballonnements ;
- écoulement nasal ;
- hypotension orthostatique ;
- intolérance à l’effort ;
- diplopie intermittente.
Ils ne doivent pas être négligés, car ils altèrent grandement la qualité de vie.
Interrogatoire et facteurs environnementaux
Enfin, différents facteurs environnementaux sont à rechercher systématiquement bien que leur responsabilité reste discutée :
- habitat en milieu industriel : exposition prolongée à des solvants organiques, à des métaux lourds (mercure, plomb, cadmium), au manganèse (soudeur) ;
- habitat en milieu rural : exposition aux pesticides organochlorés, consommation d’eau de puits.
Quand prescrire une imagerie ?
Le diagnostic de MP ne nécessite en théorie pas d’examens complémentaires en cas de présentation typique. Selon la HAS, un avis neurologique est toutefois recommandé avant d’initier le traitement pour confirmer le diagnostic. Cette attitude pourrait être discutée en cas de symptomatologie gênante et de difficulté d’obtention d’un rendez-vous spécialisé. Si besoin, le recours à la télémédecine pourrait être envisagé.
IRM et scintigraphie DaTSCAN
En cas de formes atypiques, une IRM peut être prescrite par le médecin généraliste afin d’éliminer une pathologie vasculaire ou tumorale ou identifier des anomalies compatibles avec un syndrome parkinsonien dégénératif.
Le DaTSCAN est un examen scintigraphique du domaine du spécialiste qui montre un défect non spécifique de fixation du transporteur de la dopamine au niveau striatal. Cet examen est insuffisant et non nécessaire pour faire le diagnostic de MP, car il ne permet pas de différencier une MP d’un autre syndrome parkinsonien. Il est en effet anormal dans la MP et dans les autres syndromes parkinsoniens dégénératifs. En revanche, cet examen est normal en cas de tremblement essentiel, de syndrome parkinsonien d'origine médicamenteuse et de tremblement dystonique.
Les cliniciens sont en théorie autorisés à le prescrire dans deux situations cliniques :
- tremblement mixte ;
- ou suspicion de maladie à corps de Lewy.
L’expert à la rescousse
L’existence de drapeaux rouges (cf. Tableau), ou une inefficacité thérapeutique, justifie une expertise neurologique.
Un examen neurologique complet est nécessaire afin de confirmer l’absence de troubles ou de signes :
- cognitifs (mnésiques, exécutifs, praxiques) ;
- oculomoteurs ;
- cérébelleux ;
- pyramidaux ;
- d’une dysautonomie (qui peut être difficile à mettre en évidence au stade de début).
L’expert pourra proposer une IRM à la recherche de lésions vasculaires ou d’atrophie localisée (mésencéphale, protubérantielle [signe de la croix]) ou biputaminale. Ces anomalies sont souvent tardives. Il pourra aussi s’aider d’un PET scan (recherche d’hypométabolisme focal cortical ou sous cortical) ou d’une scintigraphie MIBG (signes de dénervation cardiaque) afin d’orienter vers un syndrome parkinsonien dégénératif.
Quid des biomarqueurs sériques ou cérébrospinaux ?
La question s'est posée de savoir s'il existait des biomarqueurs sériques ou cérébrospinaux équivalents aux marqueurs amyloïdes de la maladie d’Alzheimer. Des travaux récents laissent penser que des marqueurs de l’alpha-synucléine ou des neurofilaments pourraient être utilisés prochainement en pratique quotidienne. Cependant, l’absence de traitement pouvant modifier l’évolution de la MP, ou efficace sur les syndromes parkinsoniens, relativise l’intérêt d’un diagnostic précoce. Ces marqueurs s’avèreront toutefois très utiles dans le domaine de la recherche, en cas de comorbidité ou chez le sujet âgé.
La consultation d’annonce
En 2024, ce chapitre sur le diagnostic d’une maladie de Parkinson serait incomplet sans parler d’annonce diagnostique et de parcours de soins. L'association France Parkinson a rappelé combien l’annonce était un parent pauvre de la prise en charge médicale. Elle est souvent brutale, parfois délivrée après un examen lapidaire. Il est important de prendre le temps nécessaire pour examiner, expliquer et écouter le patient et ses proches avant de débuter ou non un traitement. Une consultation d’annonce par le neurologue est nécessaire pour préciser l’impact de la maladie, le bénéfice du traitement, la place des interventions non médicamenteuses et le suivi multidisciplinaire. La HAS dans son guide du parcours de soins précise le rôle du médecin traitant qui participe à l’annonce diagnostique et elle propose une démarche en trois phases : « avant, pendant et après l’annonce ».
L’évolution de la maladie reste variable. L’absence de réponse médicamenteuse, des signes cognitifs et posturaux précoces sont en faveur d’un syndrome parkinsonien.
On distingue schématiquement quatre phases dans l’évolution de la MP :
- la phase de début avec les signes non moteurs puis moteurs qui conduisent à l’annonce diagnostique ;
- la phase d’accalmie (ancienne lune de miel) qui correspond à une période avec une qualité de vie proche de la normale grâce aux traitements ;
- une phase avancée marquée par :
- la survenue de dyskinésies (mouvements involontaires du tronc, du visage ou des membres) et de fluctuations d’efficacité (réapparition des signes parkinsoniens à distance des prises),
- des effets indésirables des traitements,
- et la progression des symptômes non moteurs ou moteurs dopa résistants ;
- la dernière phase, dite tardive, est associée à une perte d’autonomie motrice et/ou psychique. Les manifestations motrices, améliorées ou non par les traitements, ou provoquées par ceux-ci, deviennent alors très variées :
- chutes,
- freezing (blocage du mouvement) : les pieds restent « collés au sol » à l'initiation de la marche ou au demi-tour,
- cyphoscoliose,
- troubles de déglutition et de la voix,
- dystonies et dyskinésies.
De même, certains troubles psychiques peuvent être déclenchés ou aggravés par les traitements, ce qui impose du « doigté » dans l’adaptation thérapeutique. Toutes ces manifestions seront précisées dans le chapitre sur la prise en charge thérapeutique à venir (partie 3).
Sept messages clés pour les médecins généralistes
Concernant le diagnostic de MP, son annonce, et son suivi, on peut retenir sept messages clés :
- Le diagnostic doit être évoqué facilement en médecine générale en raison de la fréquence de la maladie de Parkinson.
- La clinique suffit pour poser le diagnostic, mais une IRM peut être utile pour un diagnostic différentiel.
- Le diagnostic représente un traumatisme pour le patient et le conjoint. Il nécessite une confirmation et une consultation d’annonce par le neurologue. Le médecin généraliste participe à cette annonce et à l’accompagnement.
- Les patients ont une représentation dramatique de la MP qu’il est utile de nuancer en raison de l’efficacité des traitements, de la variabilité de l’évolution et de l’importance de la recherche. Le message datant des années 1980 sur une lune de miel « qui ne durerait que cinq ans » doit clairement être abandonné.
- La suspicion d’un syndrome parkinsonien reste une situation délicate et nécessite un avis neurologique, parfois en centre expert, en raison d’un pronostic plus sombre.
- Le médecin généraliste assure la coordination du parcours de soins (et notamment de la rééducation), et il intervient dans la prise en charge des complications non motrices de la maladie.
- Le suivi du neurologue ne doit pas se résumer à un renouvellement ou une adaptation du traitement dopaminergique. Les consultations permettent d’évaluer les conséquences de la déficience motrice sur le quotidien du patient et d’effectuer un interrogatoire systématique pour dépister les symptômes non moteurs.
Éléments devant faire évoquer un autre diagnostic |
Éléments cliniques et paracliniques |
Diagnostic |
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Atrophie multi systématisée |
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Paralysie supra nucléaire progressive |
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Maladie à corps de Lewy |
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Dégénérescence cortico basale |
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