Entre 12 et 20 % des femmes concernées.Aleksandr Rybalko / iStock/Getty Images Plus / via Getty Images
L’acné est fréquente chez l’adulte, dans toutes les populations (phototype, ethnie, genre, etc.).
Les lésions peuvent perdurer depuis l’adolescence ou apparaître de novo à l’âge adulte, sous l’influence de facteurs multiples, notamment hormonaux.
À côté des modifications qualitatives et quantitatives du sébum, la perte de diversité des phylotypes de Cutibacterium acnes et le microbiome cutané jouent un rôle important dans la cascade inflammatoire participant aux lésions.
La prise en charge se fonde sur des traitements locaux, parfois complétés par un traitement oral, la stratégie étant guidée par le caractère et la sévérité des lésions ainsi que par leur durée.
Une autre option thérapeutique a plus récemment été explorée, celle de la spironolactone (diurétique doué de propriétés anti-androgéniques), qui n’a pas aujourd’hui d’autorisation de mise sur le marché dans cette indication, mais qui a fait la preuve de ses bénéfices dans des études récentes.
Longtemps considérée comme une maladie de l’adolescent, l’acné concerne aussi de très nombreux adultes de plus de 25 ans, seuil d’âge retenu pour l’inclusion dans les études cliniques dédiées.
Son incidence est estimée entre 12 et 20 % chez les femmes, quels que soient le phototype et l’origine ethnique, entre 8 et 10 % chez les hommes. Ces derniers chiffres plus faibles peuvent en partie être expliqués par la localisation de l’acné dans la population masculine, qui prédomine au niveau du tronc, et une moindre propension à consulter.
Dans un peu plus de la moitié des cas (60 %), il s’agit d’une acné ayant débuté à l’adolescence et qui se poursuit ou rechute à l’âge adulte ; dans 40 % des cas, l’acné débute après l’âge de 25 ans.
Chez la femme, il existe une recrudescence de l’acné au cours de la grossesse dans 60 % des cas.
La physiopathologie revisitée
La glande sébacée est le premier organe impliqué dans l’acné, avec une atteinte quantitative et qualitative du sébum, qui résulte de facteurs multiples (stimulation des récepteurs à la testostérone, stress, alpha melanocyte-stimulating hormone ou hormone mélanotrope...). À l’hyperséborrhée vient s’ajouter une modification de la composition du sébum, qui est plus riche en squalènes (lipides de la classe des triterpènes) ayant une forte activité pro-inflammatoire. Ceci entraîne une altération des kératinocytes du follicule pilosébacé et leur adhésion au sébum, responsable in fine d’une lésion rétentionnelle.
Cutibacterium acnes, bactérie commensale qui participe au maintien du pH acide de la peau, et le microbiome cutané jouent aussi un rôle clé dans la physiopathologie de l’acné. Des travaux récents montrent qu’il n’y a pas d’augmentation de Cutibacterium acnes, mais une perte de diversité de ses phylotypes (qui sont au nombre de six), secondaire aux modifications quantitative et qualitative du sébum [1]. La prédominance du phylotype 1A1 sur le visage et le tronc, sous l’influence du micro-environnement bactérien, est à l’origine d’une activation plus marquée des gènes pro-inflammatoires par le sébum modifié et donc de la production de cytokines par les bactéries.
Le caractère multifactoriel de la physiopathologie de l’acné explique les difficultés de prise en charge. Seul l’isotrétinoïne, en provoquant l’apoptose des sébocytes et donc l’arrêt de la production de sébum, permet de rompre la cascade d’événements conduisant aux lésions d’acné.
Des facteurs de risque bien identifiés
Chez l’homme, l’acné est largement favorisée par la prise d’anabolisants et/ou de whey protein (protéine du lactosérum ou petit-lait, souvent utilisée pour augmenter la masse musculaire). Dans ce contexte, le traitement par isotrétinoïne est voué à l’échec si la prise de ces substances est maintenue.
Chez la femme, la contraception joue un rôle majeur dans la survenue de l’acné, en particulier les pilules estroprogestatives de 1re et 2e génération qui font appel à des progestatifs plus androgéniques que ceux des pilules de 3e et 4e génération, parfois délaissées en raison d’un risque thrombotique plus élevé. Quelque 80 % des femmes qui passent d’une pilule de 3e ou 4e génération à une pilule de 1e ou 2e génération développent une acné. De même, l’implant progestatif et les dispositifs intra-utérins à la progestérone ont un effet proandrogénique et favorisent la survenue d’une acné.
Le syndrome des ovaires polykystiques, les tumeurs ovariennes ou surrénaliennes, plus rares, sont associées à un risque d’acné, qui rentre alors dans un cadre syndromique. L’hyperpilosité est un signe d’appel qui doit conduire à réaliser un bilan hormonal.
Le traitement local, un large éventail thérapeutique
Le traitement local fait appel, chez la femme comme chez l’homme, à plusieurs types de molécules, dont l’utilisation obéit aux mêmes règles :
- appliquer sur toute la zone concernée, tout le visage par exemple, et non pas sur les seules lésions d’acné, afin d’éviter le phénomène de Koebner ;
- appliquer le soir, afin de réduire les risques éventuels de phototoxicité et de décoloration des vêtements ;
- utiliser un gel nettoyant acide (pH 5 physiologique), sans frotter ;
- appliquer le matin une crème hydratante non comédogène ;
- proscrire les produits « bio » et les huiles essentielles qui aggravent l’acné ;
- ne pas oublier un photoprotecteur indice UVB 30 ou 50 et anti-UVA.
Plusieurs familles de traitements locaux sont disponibles, qui peuvent être associés :
- Les antibiotiques locaux sont très bien tolérés, mais posent le problème d’une augmentation de l’antibiorésistance. Ils ont, de ce fait, des indications limitées, en pratique surtout aux femmes enceintes qui ne peuvent bénéficier des autres traitements.
- Le peroxyde de benzoyle est utilisé à diverses concentrations, de 2,5 % à 5 % pour le visage à 10 % sur le tronc, en fonction de la localisation des lésions d’acné.
- Les rétinoïdes : trétinoïne (1re génération), adapalène (2e génération), trifarotène (3e génération).
- L’acide azélaïque, qui a une action modérée sur toutes les composantes de l’acné, mais est bien toléré.
Le choix du traitement est notamment guidé par le caractère des lésions, rétentionnelles et/ou inflammatoires et le remboursement.
Traitement systémique dans les formes sévères
En cas de lésions sévères ou ne répondant pas ou insuffisamment à un traitement local bien conduit, un traitement par voie orale est associé au traitement local chez l’homme comme chez la femme :
- antibiothérapie à faible dose (doxycycline 100 mg par jour ou lymécycline 300 mg/jour), à visée anti-inflammatoire, pour une durée maximale de 3 à 4 mois ;
- sels de zinc 30 mg/jour, un peu moins efficaces que les antibiotiques, mais dénués de photoxicité ;
- isotrétinoïne, avec une prescription strictement encadrée, en particulier chez la femme, en raison notamment d'un risque tératogène.
Chez la femme, il faut également reconsidérer la contraception.
Plusieurs études cliniques, dont l’étude française FASCE, menée dans le cadre d’un programme hospitalier de recherche clinique, ont confirmé (versus doxycycline) les bénéfices sur l’acné de la spironolactone (un diurétique épargneur du potassium doué de propriétés anti-androgéniques) à faible dose (50 et 100 mg, versus 300 mg pour la posologie diurétique) et ce, avec une bonne sécurité d’emploi, notamment l’absence d’effets secondaires biologiques tels qu’une hyperkaliémie [2].
La spironolactone n’a pas d’autorisation de mise sur le marché dans cette indication, mais l’investigateur principal de l’étude FASCE, le Pr Brigitte Dréno, va faire une demande de cadre de prescription compassionnelle auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Cette molécule ne devrait s’adresser qu’à des cas particuliers, notamment des femmes ayant une acné mandibulaire avec poussées prémenstruelles et hyperandrogénie périphérique (pas d’hyperpilosité, mais augmentation du duvet au niveau de la lèvre supérieure et de la région malaire).
D'après un entretien avec le Pr Brigitte Dréno, dermato-oncologue, université de Nantes, membre titulaire de l'Académie nationale de médecine.
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